Einstein a dit « L'école devrait toujours avoir pour but de donner à ses élèves une personnalité harmonieuse et non de les former en spécialistes », et honnêtement, qui oserait contredire Einstein. Apparemment, notre système d'éducation à cette audace.
Cette semaine, en étudiant le système circulatoire continuellement, j'ai passé les moments de procrastination que je m'accorde, contre mon gré la plupart du temps, à me demander ce que je fais à l'école. Apprendre en quoi consiste la phagocytose ou apprendre comment mettre le mot «voilà» au début d'une phrase pour la rendre déclarative ne me rapproche pas de la personne que je veux être dans le futur. Je sais que ce sont des paroles qui ont émergé de la bouche fatiguée et des cerveaux pleins à craquer de milliers d'élèves, une affirmation traduite en une multitude de dialectes, mais, vraiment, que faisons-nous?
Plusieurs études, tel qu'une menée par l'United Nations Educational, Scientific, and Cultural Organization (UNESCO), prouvent qu'adapter la méthode d'enseignement et même la matière à l'élève, donc à ses capacités et ses intérêts, pourrait être très avantageux à grande échelle. Non seulement l'étudiant lui-même appréciera l'école davantage, ce qui est très bénéfique pour sa santé mentale, mais il s'intéressera aussi à la matière qu'il étudie plus longtemps.
« Plus longtemps, vous avez amplement la capacité de deviner le présage de ces mots. »
Il ne quittera pas l'école et conséquemment, le taux sociétaire de décrochage scolaire chutera comme par magie. Les gens qui s'éduquent plus longtemps sont plus éduqués et une société plus éduquée fonctionne mieux, c'est une des rares opinions peu contestées. La clé ici, c'est que les adultes ayant eu le choix, dès un très jeune âge, d'explorer leurs talents et leurs intérêts sans limitation et barrière seraient plus heureux, plus épanouis, tout simplement. De nos jours, une nation plus heureuse est aussi souvent synonyme d'un pays plus riche. La preuve; la Suisse est classée première dans le palmarès des nations avec le peuple le plus heureux et, ne nous mentons pas, elle est aussi assez aisée financièrement.
Plusieurs avocats du diable craignent que, sans des élèves contraints à choisir entre la médecine et la physique, le droit ou la chimie, la société s'écroule sous le manque de rigides limitations. Tous auront choisi la voie de l'art. À cet argument, plusieurs contreparties sont possibles. Je crois fermement que plusieurs jeunes choisiraient malgré tout la voie de la médecine, du droit, bref des métiers très sollicités dans une société.
Cela peut paraitre surprenant pour certains, mais ces matières ne sont pas complètement haïes. Nous avons simplement l'impression qu'elles le sont car les plaintes des individus qui ne s'y plaisent pas résonnent plus fort à nos oreilles que les paroles positives des passionnés. Alors, dans ce beau système d'éducation que je m'efforce à décrire, on ne manquerait pas de spécialistes de l'algèbre, mais ceux que l'on formerait seraient en amour avec leur gagne-pain.
Évidemment, nous avons parcourus plusieurs kilomètres de progrès depuis l'école régressive qui enseigne la tenue de maison aux femmes et l'art des chiffres au sexe « fort ». Ici, au Québec, nous nous sommes aventurés légèrement hors des normes avec nos programmes de robotiques et de programmation qui ont le potentiel d'intéresser une partie des élèves.
Ailleurs, au-delà de nos frontières, on retrouve des classes de design pour apprendre le processus de création d'un produit, de la photographie, de la sculpture ou encore l'étude du développement sociétaire à l'étranger; toutes ces matières sont proposées aux élèves du secondaire, selon leurs intérêts. Nous avons fait d'énormes avancées dans les derniers siècles, mais je suis profondément convaincue que nous ne sommes qu'à l'aube de cette révolution.
Rosemarie Lacroix, La parole est aux ados