On se compare profusément. On se compare tellement que ça devrait être répréhensible, fautif, voire peccant.
Dans une ère où les réseaux sociaux sont le nouveau Louis XIV, tout semble plus gai et plus beau ailleurs. On se compare impunément à des gens qui tombent amoureux ⎯ sans gravité. Ou à des gens qui ont une de ces vies en façade parfaite. Ou bien à des gens qui ont le sourire large. Ou encore à des gens aux vêtements griffés.
On ne prend même plus en considération qu'il y a un temps pour pleurer, un temps pour rire. Un temps pour chercher, un temps pour perdre. Un temps pour déchirer, un temps pour coudre. Un temps pour se taire, un temps pour parler. Un temps pour aimer, un temps pour haïr. Un temps pour la guerre et un temps pour la paix.
En effet, lorsque l'on se compare, on se base à 99% du temps que sur des apparences, lesquelles sont trompeuses, comme l'ont dit à l'unisson pratiquement tous et chacun. On méprisera ou on adulera au premier regard, et ce, tout le temps et toujours. L'analyse de la personne en face de nous sera dare-dare et erronée, ne sachant rien de son vécu et ne se basant uniquement que sur la blancheur de ses dents ou à son sens de la mode.
Lors de l'adolescence et de l'adulescence, dans le passage obligé « on n'est plus des enfants mais on n'a pas d'enfants », notre regard face à la parure est clairement altéré, quête identitaire oblige. L'individualisme prend congé, l'esprit critique demeure. Et il demeure crûment, une mauvaise véhémence.
Même si on réalise l'ampleur et la toxicité de la comparaison de soi, l'enjeu n'est pas remédié pour autant. Ce que je veux dire par là, c'est que la majorité des personnes ne savent pas que l'être humain n'est pas pareil à une formule mathématique, identique à une équation chiffonnée sur une feuille mobile. Déjà qu'il est inadmissible de s'opposer à autrui, objectiver est plus qu'absurde.
J'explique : afin de décrire qui que ce soit, on a tous déjà commis l'erreur d'employer (tacitement, peut-être) un « plus » ou un « moins », éternels symboles de la mathématique. Et je jauge risible d'étiqueter quelqu'un «+» intelligent, «-» passionné ou «=» drôle à autrui. Dans cette optique, il y a indubitablement des comportements existentiels. « Si je suis plus sociable qu'elle mais moins que lui, qui suis-je ? » « La vie des autres est si excitante. » Mais que dire de la tienne ?
4+3=7 est une équation valable.
Intelligence de ta mère - humour de ton oncle = toi ne l'est pas du tout.
Toi + ton intelligence + toi + ton humour + toi = toi. Point final.
On n'est ni meilleur, ni pire, ni moins, ni plus, ni autant qu'une autre personne, simplement parce qu'on n'est pas une autre personne... ou de la trigonométrie.
Alexis Jacques, La parole est aux ados