Cette semaine, je suis heureux
de vous présenter ma région coup de cœur de notre belle planète : le
Myanmar... anciennement la Birmanie.
Ce pays tampon situé entre
l'Inde et la Chine est une dictature militaire qui semble s'adoucir depuis
quelques années sous les pressions économiques internationales. Il y a presque
3 ans, les frontières sont devenues plus perméables au tourisme et certaines
régions qui étaient auparavant interdites aux visiteurs voient désormais poindre
quelques hôtels reconnus par le gouvernement.
Parlant du gouvernement, les
généraux, qui s'alternent au pouvoir, ont permis des élections libres quelques
mois avant que j'y aille en 2012. Par contre, par crainte de représailles de la
part du régime, les électeurs ont voté en grande majorité pour le parti déjà au
pouvoir depuis plusieurs décennies. Voyant que les gens qui ont voté pour le
principal parti d'opposition (National League for Democracy) n'ont pas été
importunés, peut-être qu'aux prochaines élections, nous assisterons à un
changement historique.
Lors de mon passage dans un
bureau du NLD, j'ai eu la chance de m'entretenir avec des membres éminents qui
m'ont expliqué que les gens se souvenaient bien d'une fausse élection qui fut
destinée uniquement à savoir qui étaient opposés au régime et à éliminer cette
opposition. «Dû à ce triste événement, notre peuple est resté prudent, mais la
prochaine élection est à nous» m'a confié un ami de la très populaire tête du
parti, Aung San Suu Kyi, récente prix Nobel de la Paix (Il faut voir le film The Lady).
C'est donc dans ce début de
démocratie que j'ai pu vivre une expérience des plus authentiques au cœur du
peuple birman en pleine mousson. Après avoir passé quelques temps dans leur
capitale, Yangon, nous avons décidé de quitter cette zone pluvieuse pour la
dernière capitale royale : Mandalay. Superbe ville truffée de merveilles
architecturales bouddhistes. Car, soit dit en passant, le Myanmar est à forte
majorité bouddhiste. Cela peut nous paraitre étrange de lire ou d'entendre des
récits d'événements sociopolitiques assez violents perpétrés par des moines et
des adeptes d'une religion qu'on jurerait non-violente à l'extrême... Dans le
fond, presque toutes les religions prêchent la paix, ce sont plutôt les humains
imparfaits qui y adhèrent qui trahissent cet élément fondamental. Cependant,
tout au long de mon séjour dans ce beau pays, je n'y ai vu que des gens
souriants et curieux.
Je sais que ça a changé
depuis, mais lorsque j'y suis allé, il n'y avait pas de guichet automatique et
la seule vraie façon d'avoir des Kyats (devise nationale) était les bureaux de
change qui échangeaient seulement les billets de 100$US... non abimés, non
perforés, non pliés et très propres! Malgré notre grande minutie pour les
protéger de l'humidité intense et de la poussière ambiante, nous nous sommes vu
refuser certains billets, tandis que pour d'autres, ils n'ont jamais voulu nous
donner le même montant que pour les billets immaculés! Ça donne lieu à des
argumentations assez inhabituelles pour nous.
Nous nous sommes promenés sur
la colline sacrée et y avons rencontré plusieurs jeunes moines étudiants ayant
comme devoir d'engager la conversation avec des étrangers dans le but de mettre
en pratique leur cours d'anglais. Vraiment
concret comme pédagogie! Le
lendemain, nous avons visité plusieurs ateliers d'artisans et avons participé à
un rituel local qui consiste à coller de vraies feuilles d'or sur une énorme
statue de Bouddha. Cette dernière en a tellement d'accumulé depuis plus de 120
ans, qu'à certains endroits, il y a plus
de 30 cm d'or pur! Nul besoin de mentionner la protection militaire du site...
Tristement, les femmes ne peuvent pas toucher à ce Bouddha doré; c'est le seul
endroit de notre séjour où nous avons remarqué une telle discrimination.
Durant nos déplacements, nous
avons rencontré un homme extraordinaire qui conduisait un taxi : cultivé
et aimé de ses compatriotes, celui-ci était un populaire comédien qui a eu le
malheur de présenter dans une station de train un sketch satyrique dénonçant
les actions gouvernementales répressives envers son peuple. Il fut aussitôt
arrêté, tabassé et jeté en prison pour quelques années. Il nous fit part de sa
surprise d'être libéré et l'explique par une ouverture croissante des autorités
face à certaines critiques sociales. Il est cependant tenu au silence par
rapport à de futurs événements politiques et ne peut plus exercer son métier de
comédie. Sa famille et ses amis se sont donc cotisé pour lui payer un taxi afin
qu'il puisse gagner sa vie... et qu'il continue à défendre les valeurs
démocratiques et à dénoncer avec humour la junte militaire au pouvoir, devant les
clients qui s'y intéressent.
C'est grâce à cet homme que
nous avons connu des endroits moins visités de la région de Mandalay, comme la
plus grosse cloche (encore utilisable) au monde ainsi que le plus gros stupa de
la planète (s'il avait été achevée). Nous avons dû remonter le fleuve
Irrawaddy, l'un des deux seuls cours d'eau dans lesquels évoluent des dauphins
roses, pour se rendre à Mingun. Lors de notre passage s'y tenait une foire
trimestrielle où l'on pouvait retrouver tout ce dont un explorateur contemporain
rêve : médecine traditionnelle, instruments de travail qu'on qualifierait
d'antiquité ici, aliments des plus exotiques, etc. Une autre journée, il nous a
fait découvrir les quatre anciennes capitales ainsi que le pont U Bein, le plus
long pont de bois au monde... Vous remarquez sûrement la puissance et la fierté
des anciennes sociétés birmanes!
Le clou du voyage!
Ensuite, nous
nous sommes rendus dans la mythique cité royale de Bagan. Un site époustouflant
protégé par l'Unesco. Plus grand qu'Angkor Wat au Cambodge, il s'agit du plus
grand complexe templier au monde: on y dénombre plus de 4000 temples dédiés à
certaines divinités anciennes, mais majoritairement à bouddha, à sa vie et à
ses enseignements. Les véhicules motorisés ne sont pas admis sur le site qui
compte plusieurs kilomètres carrés, cela donne donc lieu à des paysages
pittoresques de gens qui se promènent grâce à d'antiques ou à de plus récents
vélos sur les sentiers sablonneux qui relient les lieux de culte.
Il y avait
une vie spirituelle réelle à cet endroit est non seulement des monuments à
visiter. Les gens viennent y prier chaque jour de la semaine correspondant au
jour de leur naissance. Donc, les temples sont remplis de fidèles
quotidiennement. Je ne me suis jamais sentis comme un visiteur dérangeant; les
responsables du culte nous ont toujours inclus dans les rituels, nous ont
proposé des fleurs à aller porter ou même d'autres offrandes que nous pouvions
acheter et ensuite imiter leurs gestes sacrés.
Nous sommes
demeurés à Bagan quatre jours durant, visitant chaque jour, à vélo, plusieurs
temples sous un soleil de plomb à 42o C. Les après-midis trop
écrasants, nous allions nous rafraîchir un peu dans la seule vraie piscine
disponible, soit celle d'un petit hôtel de luxe qui nous chargeait le gros
prix... Laissez-moi vous dire que ça en valait la peine. Les soirées, nous nous
dirigions vers les petits restos et dégustions des dizaines de petites
brochettes de légumes ou de viandes avec d'autres voyageurs, nous
racontant à tour de rôle nos péripéties: j'en garde en merveilleux souvenir...
Clin d'œil à nos amis Français, Nabil et Adeline!
Le conseil
que j'ai à vous donner est le suivant : dépêchez-vous à découvrir cette
perle de l'Asie du Sud-est avant que l'industrie du tourisme de masse la
dénature...
Bon voyage,
David Beaulieu