On a beau être encore plongé en
pleine crise pandémique, s'inquiéter du rythme de la vaccination et des
variants, la politique au sens noble cherche à reprendre place dans nos vies
collectives. À Ottawa, les partis s'agitent. Le chef du parti conservateur,
Erin O'Toole appelle à la transformation de son parti et les libéraux de Justin
Trudeau bien qu'ils s'en défendent préparent les esprits à une campagne
électorale en juin prochain. J'aurai l'occasion d'y revenir.
Aujourd'hui, portons notre
attention sur les élections municipales À Montréal, Denis Coderre piaffe
d'impatience de se venger de sa défaite aux mains de la mairesse Valérie Plante
alors qu'à Québec le maire Régis Labeaume laisse flotter le suspense sur sa
candidature sur fond de psychodrame de projets structurants de transport
collectif. À Sherbrooke, les invitations sont lancées, la conseillère
indépendante et chef intérimaire du parti Sherbrooke Citoyen, Évelyne Beaudin a
fait connaître son intention de briguer les suffrages pour le poste de maire de
la Ville de Sherbrooke. Le lendemain, le maire actuel, Steve Lussier, a rappelé
qu'il était sur les rangs. Réflexion libre sur l'état des lieux à la veille
d'une élection municipale à Sherbrooke.
Bilan d'un mandat
Je pense me faire le porte-parole
de plusieurs en affirmant que le bilan du travail du conseil municipal issu de
l'élection de 2017 est en demi-teinte. Chose certaine, ce bilan ne traduit pas
la transformation promise par le maire actuel Steve Lussier lors de sa campagne
électorale.
L'état des rues sont toujours en
tristes conditions à Sherbrooke, les taxes municipales ont connu les mêmes
augmentations que celles qu'ont connu les autres villes, le projet Well inc.
est devenu Well Sud et les investissements consentis sont à la même hauteur que
ceux qui étaient prévus antérieurement, les citoyennes et les citoyens ne sont
pas plus consultés que sous les administrations Perrault et Sévigny, la
majorité des indépendants n'a pas créé l'harmonie promise et surtout les
décisions de notre conseil municipal sont plus que jamais hantés par le fameux
huis clos.
Le
bilan économique est plutôt bon, mais il est le fait des entrepreneurs et de
l'investissement public de nos grandes institutions. Le maire ou le conseil ont
peu à voir avec ces résultats même si toutes les personnes candidates à la
mairie aiment bien s'en attribuer le mérite. Un exemple parmi tant d'autres la
désignation éventuelle de Sherbrooke comme zone innovation que la maire Lussier
aime bien s'attribuer est le résultat d'une longue mobilisation du monde
économique et de l'Université de Sherbrooke débutée sous le leadership de
l'ancien recteur de l'Université de Sherbrooke, Bruno-Marie Béchard. Alors que
le maire Lussier cherche à nous rouler dans la farine en s'attribuant cette
idée nous laisse plutôt pantois. On ne peut qualifier le mandat du maire Steve
Lussier de grand succès. Il est donc sain que d'autres personnes se portent
candidates afin que nous puissions avoir une discussion démocratique sur
l'avenir
de Sherbrooke.
Madame Évelyne Beaudin
Outre
le candidat Steve Lussier, madame Évelyne Beaudin a fait part de ses intentions
de briguer les suffrages à la mairie. C'est à mon sens une candidature qui a du
sens et qui permettra à la population d'avoir un choix parmi des alternatives
possibles. Madame Beaudin s'est distinguée dans sa défense de principes tout au
long du dernier mandat. On peut être en accord ou en désaccord avec la défense
de la parole citoyenne, l'environnement et le développement durable, les pistes
cyclables, la démocratie participative accrue et la présence de partis politiques,
mais on ne peut nier que ces idées existent et sont portés par une part de
citoyennes et de citoyens de cette ville. Sans faire de procès minimaliste à
une jeune femme remplie de qualités, on peut cependant s'interroger sur sa
vision quant au développement économique et la place des entreprises privées
dans l'avenir de Sherbrooke. L'économie sociale par exemple c'est bien, mais
cela est complémentaire au
développement
d'une économie de marché.
Il faudra aussi que madame
Beaudin nous indique la position de son parti sur la place de l'automobile dans
notre ville par rapport aux autres modes de transport. La lutte des écologistes
au transport solo prend une coloration différente au Québec à cause de notre
hydro-électricité verte eu égard à celle de nos voisins immédiats produits à
partir d'énergies fossiles ou nucléaires. Cela dit, la candidature de madame Évelyne
Beaudin au poste de maire de Sherbrooke est une excellente nouvelle pour la
démocratie et pour les choix qui peuvent être offerts aux citoyennes et aux citoyens
de Sherbrooke.
Et les autres...
Outre madame Beaudin et monsieur
Lussier, on peut se demander s'il y aura d'autres candidates ou candidats. Par
exemple, est-ce que monsieur Denis Pellerin posera à nouveau sa candidature ? Y
aura-t-il d'autres conseillères ou conseillers qui seront tentés par
l'expérience ? Madame Annie Godbout voudra-t-elle faire campagne autour de sa
vision du développement économique qui laisse une large place à la
bureaucratisation des structures de développement municipale et à
l'entrepreneuriat ? Le conseiller Marc Denault voudra-t-il nous faire profiter
de sa large expérience et venir apaiser un conseil qui semble plus divisé que
jamais auparavant ? Le conseiller et président du comité consultatif
d'urbanisme, Vincent Boutin, sera-t-il tenté de mettre son dynamisme et ses
talents de médiateur entre des intérêts divergents au service de sa ville ? Nous
le saurons bientôt...
Le rendez-vous
électoral
Chose certaine, le prochain
rendez-vous électoral est lancé à Sherbrooke. Ce sera un moment privilégié pour
la population de renouveler sa confiance dans une équipe d'élues et d'élus qui
auront une vision qu'ils partagent pour l'avenir de leur ville. En ce temps de
renouveau post-pandémique, le moment est plus choisi que jamais de créer un
véritable dialogue démocratique sur l'avenir de Sherbrooke. Comme toutes les
autres villes, Sherbrooke est traversée par des débats fondamentaux liés à la
place de la gouvernance municipale dans nos vies.
Une ville doit-elle s'occuper que
de l'essentiel comme les matières recyclables et compostables, la sécurité, les
rues et les pistes cyclables et les équipements collectifs de loisir et
d'urbanisme ou doit-elle jouer un rôle d'accompagnateur dans le développement
économique, social et culturel de toute la collectivité ? La Ville de
Sherbrooke est-elle une administration municipale ou un gouvernement municipal
de proximité ? Comment peut-on faire preuve de responsabilité fiscale quand on
est un junkie de taxes foncières ? Quelle est la part pour de grands
projets structurants pour notre économie comme un lien ferroviaire, un lien
aérien, le développement touristique ou un grand projet de transport collectif
et de développement de pistes cyclables ? Comment atteindre un juste équilibre
entre la démocratie de représentation et la démocratie participative ? Quelle
place pour la parole citoyenne ? Qu'en est-il de la transparence et de la
reddition de compte pour les élus en cours de mandat ? Voilà quelques questions
qui pourront faire l'objet de nos débats au cours des prochains mois. Reste à
connaître qui seront les femmes et les hommes qui apporteront leurs réponses à
ces diverses questions.
Chose certaine, nous souhaitons
de tout cœur que ce prochain rendez-vous électoral donne lieu à un véritable
débat démocratique plutôt qu'à une imposture comme l'a été la dernière campagne
en 2017. Imposture marquée par les mensonges, la diffamation et les coups
fourrés desquels le maire actuel est sorti gagnant. Cette fois, pas de Bonhomme
Sept Heures pour faire diversion que des idées à débatte. À ce prix, j'accepte
d'être infecté du virus électoral...