Il est indéniable que la lutte au réchauffement climatique
entraînera des modifications importantes dans nos modes de vie. Si notre
empreinte écologique est si forte c'est que nous avons profité abusivement du «
progrès » qui l'a provoquée. Dans la chronique antérieure, nous avons conclu à
la nécessité de revoir nos rapports à l'auto et de densifier l'occupation du
territoire. Nous analysons ici une autre petite « révolution » à entreprendre.
Éructations et flatulences : grandes responsables
du réchauffement climatique
Ce n'est pas facile à croire mais l'élevage des ruminants
est un grand responsable des émissions de gaz à effet de serre (GES). Plus
précisément, ce sont les éructations (rots) et les flatulences (pets) que les
bovins produisent au cours de leur digestion qui sont responsables de grandes
quantités d'émissions de méthane ; ce processus digestif se nomme «
fermentation entérique ».
Il faut savoir que les trois principaux GES sont le gaz
carbonique (C02), relié principalement aux énergies fossiles, le
méthane (NH4) et l'oxyde nitreux (N20) tous deux reliés à
l'agriculture. Le méthane a un facteur de réchauffement 25 fois plus grand que
celui du gaz carbonique d'où son importance même s‘il est moins répandu que ce
dernier.
Au Québec, en 2018, on imputait 9,6 % des émissions de GES à
l'agriculture. De ces 9,6 %, 3.6 % provenaient de la fermentation entérique des
bovins alors que 2.6 % provenaient de la gestion de leurs excréments.
Concrètement, selon le chercheur d'Agriculture Canada,
Raymond Desjardins, l'empreinte carbone du bœuf est 5 fois plus élevée que
celle du porc et 10 fois plus que le poulet. Ces émissions de méthane
représentent presque 90 % de l'ensemble des émissions de méthane reliées à
l'agriculture au Canada.
D'après l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation
et l'agriculture, les émissions de méthane issues de la fermentation entérique
se sont élevées en 2017 à 2.1 milliards de tonnes soit un peu plus de 4 % des
émissions totales de GES dans le monde. Assez semblables aux émissions
québécoises qui s'élèvent à 3,6 %, comme cité précédemment.
Cette problématique de l'émission du méthane dû à l'élevage
du bétail est d'autant plus problématique qu'il y a une nette tendance dans les
pays émergents, donc en phase intense de développement, d'ajouter la
consommation de viande de bœuf dans leur menu. L'exemple de la Chine est
patente à ce niveau.
L'élevage du bétail est responsable de la pénurie
d'eau dans l'ouest américain.
Et le débat va s'accentuer suite à une étude parue récemment
aux États-Unis démontrant que l'irrigation destinée à l'alimentation du bétail
est devenue une des causes principales de la baisse des niveaux d'eau de
rivière dans l'ouest des États-Unis dont celui du fleuve Colorado. En effet,
les cultures fourragères (luzerne, herbes et autres) seraient très gourmandes
en consommation d'eau.
À l'échelle nationale, ces cultures représentent 23 % de la
consommation d'eau, dont 32 % dans les états de l'Ouest et 55 % dans le bassin
du fleuve Colorado. Ce n'est pas rien. Des solutions sont étudiées dont celle
d'inciter les Américains à consommer moins de viande de bœuf qui dépend des
cultures fourragères irriguées.
Évidemment, les États-Unis seront tentés d'aller chercher
l'eau là où elle est. Et pourquoi pas par pipeline en provenance des Grands
Lacs (cette solution est déjà envisagée) ? Avec la déstabilisation à terme de
ces immenses plans d'eau, jusque chez nous évidemment.
La solution qui s'impose : manger moins de viande
rouge
Ces données plaident en faveur de l'abandon de la viande
rouge, du moins en grande partie. On parle ici d'un régime alimentaire de type
flexitarien.
Il n'y a pas qu'au niveau de la réduction des GES et de la
protection des plans d'eau que la modération dans la consommation de viande
rouge est recommandée. Le Guide alimentaire canadien va en ce sens de
l'adoption de cette pratique afin de diminuer les risques de maladies
cardiaques, de taux de cholestérol élevé, de cancers, d'obésité et plus.
Prenons nos responsabilités en posant les gestes cohérents
pour diminuer notre empreinte écologique et maintenons la pression afin que les
gouvernements obligent toutes les parties, dont les agriculteurs, à en faire
autant. En prenant pour acquis que nous devons nous préparer à vivre autrement.
Yves Nantel
23 janvier 2021