J'ai
attrapé ce numéro d'humour au vol. Arnaud Soly qui commente un prénom quand
même original : Ludovictor.
L'humoriste
s'éclate un peu : « c'est pas un prénom, c'est un compromis! C'est le
pizza-ghetti des prénoms! » Puis, il imagine une autre maman qui relance
avec : « ben, moi, mon fils, il s'appelle
Marc-en-ciel! »
Je ris
de bon cœur, puis, au fil des secondes, on dirait que je ris moins franchement.
N'y voyez aucune pointe de méchanceté, mais je trouve que la recherche
d'unicité dans le fait de choisir un prénom original pour son enfant peut
trahir une sorte de malaise plus grand.
Je le
disais la semaine dernière : on veut le mieux pour nos enfants. Le mot à
définir dans la phrase : mieux. Quel est ce mieux dont on rêve tant pour
notre progéniture?
Le
symptôme de quelque chose de bien plus grand...
Dans
cette façon de vouloir distinguer à tout prix son enfant par un prénom, disons,
niché, je crains qu'il y ait aussi un geste servant à lui tracer, déjà, une
voie. Comme si on y voyait une façon d'influencer sa personnalité tout en lui
créant une bulle unique qui lui permettrait tous les épanouissements. Et comme
si le fait de le nommer de façon exotique allait lui ouvrir des sentiers
autrement interdits.
Je
ressens un malaise double et, à la fois, une forme d'espoir quand j'y pense
bien.
Les
malaises...
D'abord,
cette impression que le prénom d'un enfant peut introduire une pression à
toujours être original, à toujours se démarquer. La pression d'honorer ce
prénom qu'«on a voulu si représentatif de ce qu'on souhaite que tu deviennes,
mon enfant! »
Une
façon de lui dire : on a voulu le meilleur pour toi et on a marqué le
temps et le moment en te démarquant, très volontairement, à la ligne départ. À
toi, maintenant, de livrer le meilleur dont on rêve.
Puis, il
y a ce deuxième malaise qui titille: à vouloir former des bulles qu'on souhaite
tellement distinctives, j'ai cette crainte qu'on fasse la promotion d'un
chacun-pour-soi encore plus fort que celui qu'on vit aujourd'hui. Et, pour moi,
le chacun-pour-soi est contraire à la qualité de vie dans un environnement
écorché par un surdéveloppement aveugle des 100 dernières années.
L'espoir...
J'insiste,
mes craintes ne constituent pas un jugement envers les parents qui fracassent
les standards pour nommer leurs enfants. Il se peut très que ces parents
souhaitent simplement marquer une coupure entre hier et demain. La génération
des « prénoms familiers » a relativement échoué dans le déploiement
des actions sociales et environnementales, alors on marque un passage vers
autre chose. Après tout, l'espoir habite chaque parcelle d'une vie qui débute.
J'aime
bien m'accrocher à cette notion d'espoir.
Parce
qu'on en a saprement besoin, de cet espoir!
Pour
moi, la campagne électorale actuelle se résume à peu de choses. Entre la pluie
de promesses, les manœuvres parfois poches, les répétitions de phrases vides et
cette volonté de mettre de l'argent dans nos poches, comme si c'était le remède
à tout, je cherche des traits d'union entre les gens. Entre ces citoyens qui
habitent et vivent la société.
Et je me
dis la chose suivante : le prénom de l'enfant ne changera rien. Ses
actions, oui. L'important réside dans le fait qu'il saura marcher, côte à côte,
avec les autres enfants qui deviendront, côte à côte, des adultes porteurs de
solutions pour les situations dont ils hériteront.
Prénommer
un enfant de façon originale et éclatée n'incarne pas l'espoir en soi. Ce sont
les actions qui portent et génèrent de l'espoir. Notre rôle est d'outiller les
jeunes pousses pour qu'elles puissent prendre les décisions adéquates.
Je
reviens à la campagne électorale. Je me demande bien en quoi l'obsession de
remettre de l'argent dans mes poches va influencer les fondations d'un monde
plus équitable.
Et
j'imagine cette scène toute simple.
- Il me manque de l'argent pour
arriver à la fin du mois.
- Tiens, voilà 100$. Situation
sociale réglée! Yes!
Pas sûr...
Clin
d'œil de la semaine
Dans un
société où on vit au « je », où tout le monde tutoie tout le monde,
j'ai juste hâte qu'on se « nounoie »!