Sherbrooke; ville accueillante, comme on aime le répéter. Cela dit,
vivre à Sherbrooke peut s'avérer un véritable défi pour les personnes à
mobilité réduite.
Line Lecours, directrice de l'organisme Promotion Handicap, explique
et déplore le manque d'accessibilité dans les commerces de la région de
Sherbrooke. « Parfois, il n'y a aucun problème pour entrer dans le commerce,
mais c'est rendu à l'intérieur que ça se complique. Aussi, on observe depuis quelque
temps que les appareils de paiement par carte (débit ou crédit) sont désormais
fixes, vissés à des endroits inaccessibles pour la personne en fauteuil
roulant. Il y a aussi une nette détérioration des espaces de stationnement
réservés pour les personnes handicapées. Maintenant les femmes enceintes
peuvent profiter de ces stationnements alors que l'handicapé doit payer en plus
de devoir fournir des preuves médicales de son état ».
Line Lecours ajoute qu'on aimerait bien que la Ville de Sherbrooke
adopte une politique d'accessibilité universelle pour permettre aux personnes handicapées
d'avoir accès aux parcs publics par exemple. L'accessibilité universelle
consiste à aménager des environnements sans obstacle où toute la population,
incluant les personnes ayant des limitations fonctionnelles, puisse évoluer en
toute liberté et sécurité.
« Il y a encore beaucoup de travail à faire, continue Line
Lecours. Le déneigement des trottoirs, le milieu scolaire, les
communications : à quand des sites internet accessibles aux personnes
aveugles ou sourdes? Ça aussi, c'est de l'accessibilité. Il y a aussi la
question du logement. Il n'y a pas tant que ça d'endroits, d'appartements,
accessibles à un prix abordable. Est-ce qu'on comprend qu'une personne
quadraplégique n'a peut-être pas les mêmes revenus qu'une autre personne pour
se payer un logement? »
Sur une population d'un peu plus de 150 000 personnes, la
région de Sherbrooke compte plus de 15 500 personnes vivant avec une
incapacité selon l'Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ). De ces
15 500 personnes, 10 770 éprouvent des problèmes de mobilité. En
Estrie, pour une population de près de 315 000 personnes, on compte
32 730 personnes vivant avec une incapacité et 22 745 personnes avec
des problèmes de mobilité. La mobilité se définissant par la difficulté à
marcher un demi-kilomètre ou à monter et à descendre un escalier d'environ
12 marches sans se reposer, à se déplacer d'une pièce à une autre, à
transporter un objet de 5 kg (10 lb) sur une distance de 10 mètres
(30 pieds) ou à se tenir debout pendant de longues périodes. (Source OPHQ)
« Un handicap est une limite aux activités quotidiennes de la
vie », conclut Line Lecours.
Étudier à l'université en fauteuil roulant
Kéven Breton est un jeune homme de 23 ans. Originaire de
Saint-Georges-de-Beauce, il est venu à Sherbrooke pour faire un baccalauréat en
communication et d'autres études en sciences politiques à l'Université de
Sherbrooke. Rien de bien original comme parcours. Sauf que Kéven est né avec un
handicap qui l'empêche de se déplacer par lui-même. Kéven se déplace en
fauteuil roulant manuel (non électrique) depuis son enfance et il est ce qu'on
appelle une personne à mobilité réduite.
« Sherbrooke est une ville toute en pentes
et en côtes, ce qui rend les déplacements plutôt difficiles. La King, en
fauteuil roulant, on oublie ça, confie-t-il. L'Université de Sherbrooke, on
l'appelle «la colline universitaire», ce n'est pas pour rien! Bon, il y a un
réseau souterrain qui relie à peu près toutes les facultés, mais on n'avait pas
pensé de relier les résidences universitaires à ce réseau de tunnels. À
Bishop's, ce n'est pas beaucoup mieux. On dirait qu'accessibilité et patrimoine
ne vont pas de pair! Au Cégep de Sherbrooke, à peu près tous les pavillons sont
accessibles et plusieurs pavillons sont reliés par des couloirs souterrains.
Pour ce qui est de l'accessibilité dans les commerces, sur la Wellington par
exemple, il n'y a qu'un commerce sur trois qui est vraiment accessible aux
personnes en fauteuil roulant. Enfin, moi je suis chanceux, j'ai mon auto. Ceux
qui n'en ont pas, comment ils font pour se déplacer à Sherbrooke quand les
autobus de la STS n'ont pas de rampe d'accès? », demande-t-il en
terminant.
Crédit photo : Société d'habitation du Québec