Vendredi soir. Il est 19 h. Nous sommes plus de mille personnes réunies sur les terrains de soccer au parc Jacques Cartier de Sherbrooke. Nous allons vivre un moment fort du Relais pour la vie. Près de 200 survivants du cancer vont faire un tour de piste, soit environ 0,6 km. Et tout au long du parcours, ils seront suivis et applaudis.
Ils le méritent bien.
Et je me disais...
Je me disais que ça se peut que les différences s'estompent entre les personnes. Ce soir-là, il y avait des athées et des religieux. Des bleus et des rouges quand la coloration se fait politique. Il y a des jeunes et des vieux. Des travailleurs et des assistés sociaux. Des salariés et des patrons.
Quand on y regarde de près, il y avait assez d'opposés pour alimenter bien des opinions divergentes.
Pourtant, rien.
Rien que des gens solidaires venus saluer le courage ou la mémoire de gens qui ont, un jour, croisé le cancer sur leur route.
Solidaires, je disais. La solidarité, c'est cette valeur qu'on nomme rarement, mais qu'on vit souvent. On la vit en offrant son soutien à un proche, peu importe la situation. On la vit quand on contribue, par un petit geste, à la reconstruction de Lac-Mégantic. On la vit quand on accompagne une personne seule à un rendez-vous.
On la vit, en fait, bien plus souvent qu'on la nomme. Et c'est normal. Une valeur dite ne vaut pas grand-chose. Une valeur appliquée change tout.
Je me disais aussi que le chacun pour soi n'est pas une valeur. Il n'en a pas d'ailleurs, de valeur. Individuellement, on ne peut y arriver. L'Homme moderne a cru que l'argent remplaçait le reste. Comme il a fini par croire que les légumes poussaient chez IGA, que la viande naissait en paquets de styromousse chez Provigo et que le lait était une variante du Pepsi chez Métro.
Le chacun pour soi nous a fait oublier la valeur des choses. La valeur des échanges. La valeur des gens. La valeur des gestes. La première chose qu'on fait, en entrant chez soi, c'est de bien refermer et barrer la porte.
Vendredi, nous étions plus de mille à réaliser que, seuls, on ne fait pas long. Je me disais surtout qu'il est dommage qu'on ait toujours besoin de quelque chose de grave pour mettre en valeur nos capacités.
Vendredi, je me suis même dit aussi que si on s'arrêtait un peu et qu'on écrivait quelques valeurs sur un bout de papier et qu'on se donnait la mission personnelle de vivre en concordance avec ces valeurs, le monde serait changé.
Imaginez qu'on écrive sur une page d'agenda les mots solidarité, engagement et respect sur une feuille. Et qu'on décide que chaque geste qu'on fait doit être en concordance avec ces mots. Imaginez un peu. Ça va faire une méchante journée! Imaginez maintenant que demain, les mêmes mots reviennent. Et imaginez finalement que chaque humain a les mêmes mots dans ses pages d'agenda.
Ouais, je sais, je devais être euphorique un brin, ce soir-là... Ah! Pis, on l'essaie! Pas game?
Clin d'œil de la semaine
Réponse à un Témoin de Jéhovah matinal insistant à la porte : « Ouin, je t'entends bien. Tu sais, je ne suis pas religieux, mais on m'a dit, à l'époque, qu'il fallait s'aimer les uns les autres. J'essaie fort. Mais y a des matins que c'est plus dur... »