L'an dernier, la Cour d'appel du Québec s'est à nouveau prononcée sur le sujet. Dans Marcoux c. Directeur des poursuites criminelles et pénales le 29 juin 2015 no 500-10-005608-144.
Les faits semblent les suivants. Marcoux est propriétaire depuis 1980 d'un terrain en bordure d'une rivière où il loue des chalets, des terrains pour des roulottes, etc. Le site comprend également une plage.
D'année en année Marcoux fait du nivelage et «dévégétalise» la bande protection riveraine; Marcoux prétend que ces travaux d'entretien de la plage sont nécessaires à l'exploitation de son entreprise, qu'il en est ainsi depuis 1957, donc qu'il a des droits acquis.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales porte les accusations suivantes contre Marcoux :
1er chef: D'avoir ... entrepris l'exercice d'une activité susceptible de résulter en une émission, un dépôt, un dégagement ou un rejet de contaminants dans l'environnement ou une modification de la qualité de l'environnement sans avoir obtenu préalablement du Ministère un certificat d'autorisation, contrairement aux articles 22 alinéa 1 et 106 de la Loi sur la qualité de l'environnement.
2e chef: D'avoir exécuté des travaux ou ouvrages dans un cours d'eau, soit le littoral de la rivière l'Assomption, sans avoir obtenu préalablement du Ministère un certificat d'autorisation, contrairement aux articles 22 alinéas 2) et 106 de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Après avoir résumé les nombreuses décisions déjà rendues par les différentes instances judiciaires, le juge de la Cour d'appel retrie les principes suivants :
«
a) les lois et les règlements protégeant l'environnement doivent recevoir une interprétation large et libérale.
b) quand il s'agit d'environnement, l'auteur d'activités polluantes ne peut opposer une défense de droits acquis, sauf si la loi le prévoit en "termes non équivoques";
c) l'autorisation du Ministère n'est pas requise si l'exploitant d'une entreprise exerçait celle-ci, même de façon saisonnière, avant l'entrée en vigueur de la loi;
d) l'autorisation du Ministère est requise en vertu de l'alinéa 1 de l'article 22 LQE lorsqu'il est question d'érection ou de modification d'une construction, ou dans le cas d'une industrie, de l'augmentation de la production d'un bien ou d'un service;
e) l'autorisation du Ministère n'est pas nécessaire en vertu du second alinéa de l'article 22 LQE si l'entreprise existait avant l'entrée en vigueur de la loi et qu'elle continue l'exercice de son activité depuis;
f) Cependant, l'autorisation du Ministère sera nécessaire en vertu du second alinéa de l'article 22 LQE lorsqu'il est question d'érection ou de modification d'une construction, d'exécution de travaux ou d'ouvrages.»
C'est ainsi que dans cette affaire, le juge a acquitté Marcoux du premier chef au motif que les travaux exécutés étaient des travaux saisonniers, qu'il ne s'agissait pas de travaux d'érection ou de modification au sens du premier alinéa de l'article 22 LQE; pour le juge les travaux «correspondent davantage à une activité continue», de sorte que Marcoux avait des droits acquis.
Relativement au second chef, le juge considère qu'il vise les activités d'entretien effectuées par Marcoux, soit «l'exécution de travaux ou d'ouvrages en milieu hydrique» et non pas une exploitation industrielle, auquel cas, il aurait pu bénéficier de droits acquis. Le juge maintient donc la condamnation de Marcoux.
À la lecture de cet arrêt, il faut retenir que le choix des mots utilisés par le législateur est primordial dans l'appréciation des lois.
Au plaisir.