Il est important pour les parents qui sont débiteurs d'une pension alimentaire pour leurs enfants de s'assurer que cette dernière évolue au fil des années en fonction de leurs revenus respectifs. En effet, une fois établie, la pension alimentaire pour enfant ne devrait pas rester statique et devrait plutôt être ajustée afin de correspondre à la situation financière des parties.
Ainsi, si vous être soumis au paiement d'une pension alimentaire pour le bénéfice de vos enfants, il est important de tenir votre ex-conjoint(e) informé(e) des variations de vos revenus, le cas échéant. À défaut de le faire, vous vous exposez au risque de vous faire imposer le paiement d'un ajustement rétroactif de pension alimentaire, de même qu'au paiement d'une indemnité à l'égard de l'autre parent, le tout pouvant se révéler être un montant assez salé à débourser.
En effet, la loi énonce que les parents doivent agir de façon à maintenir à jour la pension alimentaire payable pour leur(s) enfant(s). Cette obligation des parents est énoncée au Code civil du Québec selon les termes suivants :
596.1. Afin de maintenir à jour la valeur des aliments dus à leur enfant, les parents doivent, à la demande de l'un d'eux et au plus une fois l'an, ou selon les modalités fixées par le tribunal, se tenir mutuellement informés de l'état de leurs revenus respectifs et fournir, à cette fin, les documents prescrits par les règles de fixation des pensions alimentaires pour enfants édictées en application du Code de procédure civile (chapitre C-25.01).
L'inexécution de cette obligation par l'un des parents confère à l'autre le droit de demander, outre l'exécution en nature et les frais de justice, des dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi, notamment pour compenser les honoraires professionnels de son avocat et les débours qu'il a engagés.
Il est donc à comprendre de cet article que, à la demande de l'autre parent, vous devrez transmettre à ce dernier votre plus récente déclaration de revenus, votre avis de cotisation, ou encore vos plus récents talons de paye, et ce, de manière à le tenir informé de l'ampleur de vos revenus actuels. Ce devoir de base prévu par la loi s'applique à l'endroit de tous les parents séparés ayant des enfants, et ce, afin que ces derniers bénéficient du montant de pension auquel ils ont droit.
Toutefois, dans certains cas, le jugement établissant la pension alimentaire payable pour les enfants prévoit une obligation particulière à cet effet. À titre d'exemple, des clauses exigeant que les parents s'échangent leur déclaration de revenus au plus tard le 1er juin de chaque année, ou encore, que les parents s'avisent mutuellement de tout changement significatif de leurs revenus dans les dix jours d'un tel changement, se retrouvent fréquemment dans les jugements de cette nature. Il est donc important pour vous de bien connaître la portée de vos obligations à cet égard et de vous y conformer.
En cas de non-respect de votre obligation d'information à l'égard de l'autre parent, vous ouvrez la porte à ce dernier à entamer une procédure judiciaire à votre encontre. À cet effet, si l'autre parent doit avoir recours à un avocat pour obtenir transmission de vos informations financières, conformément à ce que la loi prévoit, il lui sera notamment possible de vous réclamer le remboursement des frais d'avocat qu'il aura ainsi dû débourser.
À l'opposé, si vous êtes le parent qui souhaite recevoir transmission des informations financières de l'autre parent, sachez qu'il existe des recours à cet effet et à l'égard desquels vous pourrez réclamer les frais déboursés. Si vous envisagez aller de l'avant avec un recours de cette nature, assurez-vous néanmoins d'avoir vous-même rempli votre part de l'obligation et d'ainsi démontrer votre transparence à votre ex-conjoint(e) relativement à vos revenus. Ce qui est bon pour l'un l'est également pour l'autre !
En plus de cette possibilité de vous faire refiler une facture d'avocat, l'omission de tenir l'autre parent avisé de l'évolution de vos revenus comporte également une autre conséquence monétaire. En effet, la loi permet à un parent de réclamer, pour un enfant, des aliments pour des besoins existant avant une demande de pension alimentaire, ou d'ajustement de celle-ci. En principe, toutefois, on ne peut alors exiger des aliments au-delà de trois ans, sauf lorsque le parent débiteur a eu un comportement répréhensible envers l'autre parent ou l'enfant (article 595 du Code civil du Québec).
Il est donc à comprendre que si l'autre parent se rend compte que, depuis l'établissement de la pension alimentaire, vos revenus ont considérablement augmenté et que vous avez omis de l'en aviser, il lui sera possible de demander que le montant de pension qu'il reçoit pour les enfants soit également augmenté de façon rétroactive. Il lui sera alors possible de réclamer une rétroaction de trois ans, et même davantage si les circonstances le permettent.
En outre, le parent pourra alors demander que le montant total de cet ajustement rétroactif lui soit payé immédiatement, en entier et en seul paiement, ce qui est susceptible de causer un trou non planifié dans votre budget. L'idéal est donc de faire preuve de transparence envers l'autre parent relativement à votre revenu, et ce, afin que le montant de la pension alimentaire puisse être ajusté au fur et à mesure de manière à refléter votre réelle situation financière.
Finalement, sachez que des procédures d'ajustement de pension alimentaire peuvent s'effectuer de façon conjointe par les parents par le biais du Service administratif de rajustement des pensions alimentaires pour enfants (SARPA), lequel service est simple et peu coûteux. Que vous soyez le parent débiteur ou créancier, il peut néanmoins s'avérer utile de consulter un avocat afin de vous faire dresser le portrait de vos droits et obligations concernant l'évolution de la pension alimentaire et recevoir conseils sur la manière d'agir afin de les faire respecter ou de vous y conformer.
Me Laurence Ferland, avocate
Fontaine Panneton Joncas Bourassa & Associés