L'air de rien, je viens d'effacer mon début de chronique. Je
commençais en me demandant si ce que j'ai en tête est d'ordre générationnel. En
relisant mon ex-première phrase, je me suis dit « pas sûr... peut-être qu'il
n'y a pas que les fossés générationnels, dans la vie ! »
L'aspect des générations me venait de ce nouveau dilemme
auquel nous sommes constamment confrontés : est-ce que je me déplace ou
bien j'envoie un message tout beau et rempli d'émoticônes ?
Et là, juste là, j'insiste précipitamment : je sais que
les conversations avec vidéo constituent une excellente façon de pallier la
présence humaine qui n'est pas possible. Je ne parle pas de la distance trop
grande qu'on en vient à contourner par le biais de la très performante
technologie que l'on tient dans sa poche !
Je parle de ces dilemmes du type : « ouin... j'y
vais ou pas? Après tout, je ne connais pas tant que ça le monde qui y sera. Et
je suis fatigué. Pis peut-être qu'une telle ou un tel n'y sera pas... »
Les dilemmes qui surviennent lors de funérailles, de
rencontres plus ou moins formelles, d'anniversaires et quoi encore ?
Pour moi, on dirait que le dilemme a grandi depuis la Covid.
Je crois vraiment qu'une des conséquences de ce qu'on a vécu
en 2020 et 2021 tient au fait que nous sommes plus que jamais centrés sur notre
nous-mêmes.
C'est comme si ce qui nous semblait naturel avant est devenu
quelque chose à réapprendre. On pensait que les rencontres sociales, c'était
une notion innée. Visiblement pas !
On a tout perdu d'un coup !
Un peu comme si, collectivement, on était sortis fatigués de
l'aventure covid-19 et que, quatre ans après, on se repose encore !
Une semaine de même !
La semaine dernière a apporté, sur trois journées, trois
occasions différentes de rencontrer des gens. La réflexion d'escamoter une ou
deux de ces occasions s'est présentée par moments.
La grisaille de novembre, la séquence de travail intense, la
fatigue accumulée, la distance, le temps pour soi qui manque parfois... les
options étaient là pour m'éclipser.
Ce que je n'ai pas fait.
À rebours, j'en suis très heureux. Constater le plaisir
ressenti par les gens qu'on visite est, en soi, porteur d'une sorte de chaleur.
De bien-être. Et quand, en plus, on joue le jeu de bonne manière, l'effet est
partagé et se trouve multiplié.
Jouer le jeu, ce n'est pas faire semblant. Pas pour moi, en
tous les cas.
Jouer le jeu, c'est plutôt se prêter au jeu. Prendre du
temps pour écouter ce que l'autre a à dire. Entrer en contact. Communiquer.
Je n'ai pas vécu de grandes révélations. Pas de grand impact
qui change une vie. Juste des bons moments. Des souvenirs de visages
reconnaissants, de gens heureux de simplement renouer avec des amis, des
collègues, des proches. Des sourires qui naissent à partir des trucs dont on se
souvient. Le plaisir de partager des éléments qui nous animent.
À rebours, disais-je, je suis heureux de ces trois
rencontres. Très. Elles me font sentir un peu plus riche de cette denrée qui
manque et que la technologie n'arrive pas à remplacer : la chaleur humaine
qu'on ressent et dont on se nourrit.
L'air de rien, j'ai bien fait d'effacer la première phrase
qui devait introduire cette chronique.
Les générations n'ont rien à y voir.
La rencontre avec l'autre constitue un repère apaisant.
Peu importe les générations...
Clin d'œil de la
semaine
Les
rencontres font souvent en sorte d'effacer les différences qui séparent parce
qu'elles mettent en lumière les ressemblances qui nous unissent...