Par définition, le mot restaurant est défini ainsi dans le dictionnaire : établissement qui fournit des repas en échange de paiements. Je dois dire que je m'apprête à défaire complètement cette signification. Ma visite sur la rue Marquette au restaurant l'Empreinte cuisine soignée risque de bouleverser positivement aussi votre rapport avec la restauration. D'abord, j'entre avec ma copine dans le nouveau restaurant. Sur la piste des restaurateurs, L'Empreinte est encore codée dans la catégorie nouveaux restaurants. André Plante, Daniel Charbonneau et sa conjointe Mélanie Alain ont ouvert ce petit bijou depuis le mois de mai dernier.
Auparavant un traiteur, cet endroit commercial a aussi dans le passé hébergé une crèmerie. Dès la prise de possession du petit local, les rénovations ont commencé. Daniel et André ont tout fait eux-mêmes. André Plante est sommelier de formation, Daniel est un chef cuisinier audacieux. Le maître de cuisine gravite autour de la restauration depuis l'âge de 13 ans. Peut-être que tout a commencé avec la routine d'éplucher des patates, oui, mais aujourd'hui, Daniel est un chef accompli. Et André? André est un autodidacte. Il a valsé dix bonnes années dans l'univers du pinard avant de suivre ses formations. Il a même marché Compostelle avec quelques arrêts obligatoires dans les vignobles en parallèle de sa route. Mais ces deux-là, ils sont aussi habiles de leurs mains. À vrai dire, c'est plus facile de leur demander dans quoi ils ne réussissent pas.
Mon siège est prêt, une charmante pièce tourne autour de mes yeux. 28 places maximum ici, pas plus. Il faut donc réserver rapidement, en fait, aussitôt que l'envie se fait sentir de tenter l'expérience de l'empreinte. Je suis prise en charge par Yannick Leblanc, mon serveur attitré pour la soirée. Comme il est charismatique! Il m'explique le menu avec une aisance déconcertante. Mes yeux se promènent aussi sur l'ardoise noire géante peinturée sur le mur du fond. Le menu proposé y est inscrit avec une grosse craie blanche. Nous avons le choix, un 4 services, un 7 services ou un 12 services. Nous optons pour le chiffre chanceux. Le 7 sort donc grand gagnant.
Ma mise en bouche arrive, avec l'association d'un vin succulent. Un risotto crème de foie gras, céleri, tartufata et yuzu. Ma bouche est contente, tout explose de saveurs ici. Mais tout est si bien balancé, réfléchi. En cuisine depuis quelques semaines à peine, Suzy Rainville de l'émission Les Chefs vient de se greffer à la minuscule brigade. Elle est talentueuse et elle rejoint le mode de pensée de l'équipe. Ici le mot empreinte signifie beaucoup. Oui ça passe par l'empreinte digitale agrandie imprimée qui se retrouve en guise de signature sur les coupes de vin du restaurant. Mais c'est surtout l'empreinte écologique, l'optique écoresponsable et l'empreinte laissée dans la communauté qui intéresse les proprios. Ils travaillent le plus possible avec des produits de saison, font affaire avec des producteurs locaux, encouragent la culture de quartier et s'approvisionnent avec la pêche responsable. C'est-à-dire la pêche à la ligne, qui respecte l'environnement. Mais la question n'est pas juste d'avoir une conscience verte, la relation avec les producteurs et les fournisseurs va vraiment au-delà de la signature de contrats. L'importance de connaître le produit, comment les maraîchers préparent leurs récoltes, comment les éleveurs soignent le bétail. C'est un ensemble qui forme la trace indélébile parfaite que souhaite laisser L'Empreinte cuisine soignée dans le cœur des mangeurs Sherbrookois.
Pendant que j'assimile ses informations, je mange encore. J'enchaîne des huîtres sur coquille, gelée Bloody et une soupe style ramen qui n'a absolument rien à voir avec mes souvenirs de soupes ramen à 25 cennes. Et une chance!!! Un œuf se retrouve à l'intérieur de mon bouillon, avec de la caille, de la courge spaghetti et des poireaux. Hé oui, une soupe sans nouilles. Mon amie partage ma stupéfaction, dans le prochain plat de foie gras rôti, nous mangeons du Pop-corn de sarrasin. Honnêtement, j'ignorais totalement l'existence de ce produit. C'est délicat et éclaté à la fois. Je remarque que les portions sont dosées à la perfection. Je n'ai pas la sensation de lourdeur que nous avons lors d'un grand repas. Il y en a juste assez dans chaque assiette. Ce qui me stimule encore plus à découvrir la suite. Mention d'honneur pour le plat végétarien qui était divin. Un taboulé de brocoli, pomme-avoine-pépins de courge, Pont Blanc et morilles. Dans les faits, je n'ai jamais goûté des champignons aussi délicieux. Le menu change chaque mois ici, mais je souhaiterais que jamais ce plat ne soit retiré du menu. C'est si bon.
La viandeuse en moi se régale avec ma pièce de bison. Avec du chou rouge, un fromage Alfred et du thé des bois, mes papilles sont ailleurs et c'est ce que j'apprécie.
Le dessert m'appelle. On m'assure que c'est Mélanie qui a mitonné ce joli cake. Même avec mon CV impressionnant en matière de visites de restos, c'est vraiment la première fois de ma vie que je goûte à un entremets sucré à base de céleri et de panais. Un cake au panais et une glace au céleri, la maman en moi sourit. Wow! Des légumes dans le dessert, et ça passe bien. À ma grande surprise, mon palais note facilement la présence du céleri. Mais j'adore ça. Le mix avec la tire éponge à saveur de céleri est parfait.
À ceux qui pourraient penser que c'est cherrant, L'Empreinte cuisine soignée offre un menu 4 services pour 39 $ et 3 services le midi pour 19 $.
Inspiré par ses nombreux voyages à New York, le chef tatoué est devenu dans mon cœur, l'Empreinte même de nos meilleures tables à Sherbrooke. Une empreinte que même la pluie, le vent, la neige, n'arrivera à déloger.