« J'en
appelle au gros bon sens »
« Bien,
voyons, ça tombe sous le sens, pourtant! »
Voilà des
phrases passe-partout qui ont, en prime, le pouvoir de clouer le bec de nos
interlocuteurs, sauf si un de ceux-ci nous demande de préciser notre pensée.
J'illustre
avec un exemple. Dans le contexte d'une situation de relations de travail, il
m'est arrivé qu'un collègue me dise : « ben, là, on peut-tu
juste appliquer le gros bon sens? »
J'ouvre
une parenthèse: on ne peut pas vraiment répondre non à cette question! Alors, à
défaut du « non » qui n'aurait pas de sens, il reste le « oui,
mais... ».
Mais je
reviens à l'exemple. Je lui ai répondu : « oui, mais, c'est quoi, le
gros bon sens? Si c'est de laisser passer la situation parce que « ça ne
change rien pour personne », est-ce qu'on a vraiment réfléchi aux
conséquences? Est-ce qu'on crée un précédent qu'on ne pourra tenir ensuite? Ou
est-ce que si ça tombe sous le sens pour tout le monde, a-t-on pensé à
régulariser le tout de façon plus formelle? »
Le gros
bon sens, basé sur rien, est une coquille vide.
La
notion de gros bon sens réfère à notre culture personnelle, à la façon apprise
de nos parents de vivre en société. Tout cela en tenant compte du contexte
familial, socio-économique, religieux, dans certains cas. Bref, de bien des
éléments qui font que, dans notre esprit, telle chose a (ou non!) un sens.
Donc,
pour moi, le « gros bon sens » en appelle à tout et à rien en même
temps.
Un
cul-de-sac dans tous les sens!
Je
mijotais toutes ces pensées autour du sens.
Il
suffit de jeter un œil aux informations, ces temps-ci, pour constater que ça va
justement dans tous les sens!
Notre
environnement est bousculé. Les grands écarts climatiques s'imposent. Les
conflits entre pays et personnes se multiplient. Un fossé social se creuse
entre la droite et la gauche. Les acquis sont de plus en plus discutés, alors
que la main droite détruit ce que la gauche a construit.
Le moins
que l'on puisse dire, c'est que le gros bon sens de l'un, n'est pas celui de
l'autre!
Réapprendre
à communiquer.
À ma
connaissance, il n'y a jamais eu autant de gens spécialisés en communication
dans notre société.
Pourtant.
Je
constate que le type de communication que ces gens pratiquent ne vise pas à entrer
en communication avec autrui, mais vise plutôt à faire passer un message. Une
pilule, parfois.
En
entrevue, en 2021, Jean Chrétien mentionnait son amour pour les périodes de
questions à la Chambre des Communes. Il aimait les débats sur des questions
qu'il ne voyait pas toujours venir. Il aimait la spontanéité des échanges.
De nos
jours, les instances politiques demandent aux équipes de communication d'imposer
des délais entre le temps où on reçoit une question et le moment où une réponse
est émise. Souvent, c'est minimalement 48 heures. Le temps de bien peser,
lécher, édulcorer et raffiner une réponse qui viendra, idéalement, clore la
chose.
C'est de
la communication à sens unique. Un émetteur qui impose quelque chose à un
récepteur. Point.
Il nous
manque de communication réelle. Avec des allers-retours dynamiques.
Une
communication qui exige deux jours entre chaque interaction devient nulle. Elle
noie le poisson. On peut croire, d'ailleurs, que c'est l'effet recherché, dans
bien des cas.
L'idée
de contrôler le message mine la confiance, isole l'électeur de la structure
décisionnelle.
Il faut
réapprendre à communiquer. L'apparence de transparence n'est pas de la
transparence.
Des
enjeux nous guettent. Il faudra mieux communiquer.
Notre
société oublie de plus en plus de gens derrière, la révolte suivra à coup sûr.
Il faut réapprendre à communiquer.
Je crois
que c'est la base de tout.
Entrer
en contact réel. Établir une vraie communication.
Me
semble que ça relève du gros bon sens...
Clin
d'œil de la semaine
Aucun
traité de paix entre deux nations ou deux personnes ne se termine par : "Puissions-nous
dorénavant nous comporter avec un gros bon sens élémentaire"...