Au sein
des différents conseils de ville du Québec, une sorte de vent a soufflé
dimanche dernier. Une des particularités du vent, c'est qu'il ne se voit pas;
il se sent. On ne peut pas l'emprisonner
dans un bocal pour l'analyser ensuite.
Ainsi le
vent qui a soufflé est perçu selon le biais de chacune et chacun.
Vent de
fraîcheur pour les uns, vent de panique pour les autres. Vent de changement,
vent de front, vent dévastateur. Vent qui porte les semences d'une nouvelle
dynamique. Vent qui détruit tous les repères. C'est selon.
Le vent,
c'est comme ça : ça dépend comment on le sent.
La
confiance, c'est autre chose. Elle vient généralement de base, par défaut, je
dirais. Comme si c'était un choix presque automatique : « On va faire
confiance, on verra bien! » « On va donner la chance au coureur et on
verra ».
En
relisant les deux dernières phrases, on voit bien que ça ne tient pas à
grand-chose, tout ça. L'affaire, c'est que c'est une potentielle confiance, pas
encore une confiance établie.
Parce
que la confiance se construit. Elle demande du temps, de la rigueur; de la
transparence dans les explications qu'on donne; de l'écoute (de la vraie, pas
juste de l'écoute autoproclamée!). Bref, elle devient solide par la démonstration.
La
confiance a le fardeau de sa preuve.
Le
piège des communications abusives
Le
réflexe des machines politiques a été, au fil des dernières décennies,
d'investir temps, efforts et ressources pour engager des spécialistes du
message. L'idée n'était plus de parler ouvertement et clairement de ce qu'on
souhaite faire, mais bien de naviguer au gré des humeurs mesurées des citoyens,
de multiplier les sondages, d'écrire un programme aux grandes lignes
prometteuses et aux petits textes sans engagements réels. On confiait
littéralement à un spécialiste l'ensemble des lignes qu'on répétera inlassablement
pendant la campagne électorale.
Quand on
déconstruit l'édifice de la confiance, on sème le cynisme.
Et on se
retrouve avec un taux de participation aux élections de 38% en moyenne au
Québec. Pour le palier qu'on dit (et qui est) le plus proche des citoyens.
Le
fardeau de la preuve
Je me
souviens de cette remarque entendue il y a plusieurs années : « si
quelqu'un t'accusait d'être en amour avec ta conjointe, y aurait-il assez de
preuves pour bâtir un dossier solide? »
Quand
les élues et élus nous remercient « de notre confiance », je souligne
que celle-ci n'a été que manifestée. Qu'on accepte d'ouvrir le chantier, mais
que le bâtiment de la confiance reste à construire.
La
méfiance, elle?
La
méfiance peut se construire au fil des coups et épreuves qu'on subit sur notre
parcours. Chez les plus traumatisés, elle est plus difficile à déconstruire. Et
la confiance devra miser sur une multitude de petits gestes pour devenir plus
forte que la méfiance.
Mais le
danger qui nous guette dans le propos de cette semaine n'est pas le même.
La
méfiance, c'est aussi cette chose qu'on répand. Comme une couche de mélasse
qu'on coule sur le plancher et qui colle aux chaussures même des mieux
intentionnés.
Cette
méfiance-là ne demande pas de courage. La confiance qu'on construit demande une
forme de courage.
La
méfiance dont je parle, c'est celle qui n'a pas besoin de preuves. Celle qui
met tout en doute. Le doute est la semence de la méfiance et ça pousse partout,
cette affaire-là. Les complotistes l'utilisent à grands cris et gestes. Mais
eux, ils n'ont qu'à affirmer. Ils n'ont pas de preuves à faire.
Pas
besoin de courage pour semer doute et méfiance.
Mon
souhait
Le
complot et ses théories poussent mieux dans un environnement où le bâtiment de
la confiance est en décrépitude.
Je
souhaite que le courage souffle dans la voile des nouvelles et nouveaux élus.
Que ce courage alimente le vent. Que le vent souffle assez fort pour changer
les perceptions, mais pas trop pour tout arracher autour.
Plus on
bâtira la confiance et moins le terreau de la méfiance sera fécond.
La
confiance se construit. La méfiance n'a qu'à se répandre.
Bâtissons.
Clin
d'œil de la semaine
Gilles Vigneault affirmait
ceci (citation libre et de mémoire) : plus le complotiste s'acharne à
faire connaître le complot, plus il s'y enlise et plus le complot se retourne
contre lui.