Ces dernières semaines, le thème de la nation et du
nationalisme a ressurgi dans l'actualité de diverses façons notamment par le
choix de la Coalition avenir Québec d'en faire un enjeu de la prochaine
élection. Il y a eu aussi l'arrivée de souverainistes comme candidat de la CAQ
dans les comtés de Lévis et de Sherbrooke. Il ne faut pas passer sous silence
non plus les querelles des souverainistes issus du Parti québécois qui dans le
sillon de l'« Année Lévesque » ont réussi à jeter de l'ombre sur l'hommage que
le Québec fera tout au long de l'année à l'un de ses plus illustres fils,
l'ancien premier ministre René Lévesque. La campagne électorale qui vient
viendra à n'en point douter remettre à l'ordre du jour la question de l'avenir
du Québec et de sa place au sein du Canada. Malgré la certitude que nous donnent
à voir de nombreux sondages d'opinion dont le dernier parut dans la revue
Actualité, rien n'y fait. C'est le retour du refoulé.
À l'aube du retour des célébrations en personne de la Fête
nationale du Québec, il m'apparaît opportun de se rappeler celles et ceux, des
gens issus de cette société qui ont fait beaucoup pour faire du Québec une
société d'exception en Amérique du Nord. Parmi ceux-ci, deux personnalités
retiennent tout particulièrement l'attention en ce mois de juin 2022. Bien sûr,
il y a René Lévesque qui aurait célébré le 100e anniversaire de
sa naissance le 24 août prochain et Pierre Bruneau qui a quitté son poste
de chef d'antenne de l'information au réseau TVA. Ces deux personnalités
singulières auront toutes les deux marqué le Québec par leur proximité avec le
vrai monde et par leur popularité auprès de l'immense majorité de la
population. Le point sur le Québec et ses gens.
Un passé
masculin et blanc ?
Rendre hommage à deux personnalités comme René Lévesque et
Pierre Bruneau est un choix qui a ses limites. Cela témoigne d'un passé qui a
été très masculin. Ce qui ne signifie pas pour autant que les femmes ont été
absentes de notre histoire. On pourrait rappeler le passé de Claire
Kirkland-Casgrain qui a été partie du même gouvernement libéral que René
Lévesque et qui a fait reconnaître les femmes dans notre droit civil. Il y a eu
aussi Thérèse Casgrain, Jeanne Sauvé, Lise Payette, Pauline Marois, et Françoise
David qui a elle aussi fondé un parti politique avec Amir Khadir. Depuis les
cinquante dernières années, les femmes se sont faites de plus en plus présentes
dans la vie politique. D'ailleurs, notre présent est façonné par de nombreuses
femmes. Quand on pense à la scène politique sherbrookoise, c'est au féminin que
cela se passe aujourd'hui avec les Geneviève Hébert, Christine Labrie, Évelyne
Beaudin, Élizabeth Brière et Marie-Claude Bibeau. Sans compter que l'on ne peut
oublier le rôle majeur joué dans cette région par l'ex-ministre libérale
Monique Gagnon-Tremblay qui publiera ses mémoires au cours de la prochaine
année.
Outre ces personnalités, on peut aussi mentionner des noms
comme Max Gros-Louis, Madeleine Parent, Gregory Charles, Leonard Cohen, Céline
Dion, René Angélil, Pierre Péladeau, Guy Lafleur, Michael Bossy, Guy Laliberté,
Michel Tremblay, Naïm Kattan et de nombreuses autres. Des gens qui font la
fierté du Québec.
Cela dit, il reste que René Lévesque et Pierre Bruneau se
distinguent particulièrement pour leur proximité avec la population. Leurs
capacités hors du commun d'entrer en relation avec monsieur et madame tout le
monde en font des personnages singuliers. Chacun dans leur domaine, ce sont
deux géants du Québec contemporain qui méritent de voir leur nom associé au
Québec au moment de notre fête nationale.
René Lévesque
On a beaucoup écrit sur René Lévesque. Chacun veut
s'approprier un bout de cette personnalité pour mousser sa cause. René Lévesque
a été un si gigantesque personnage. Journaliste hors du commun qui a tracé les
sentiers de la présence du Québec au monde, il fut aussi un personnage
politique singulier qui a fait grandir le Québec. C'est pourquoi la semaine
dernière dans ma chronique j'ai déploré les querelles intestines du PQ, des péquisteries
ai-je écrit, qui sont venues jeter de l'ombre à cet homme qui voulait que le
Québec prenne sa place dans le monde et qu'il cesse de penser qu'il était né
pour un petit pain. René Lévesque a été si grandiose et a eu une carrière si
éclatée que tous peuvent trouver quelque chose à boire et à manger dans ses
propos pour promouvoir leurs causes. D'ailleurs, le lancement de l'« Année
Lévesque » en a fait la preuve si l'on prend la peine d'entendre les discours
livrés pour l'occasion par les différents chefs des partis politiques présents
à cet événement. René Lévesque est quelqu'un qui est source de fierté pour le
Québec d'aujourd'hui.
Pierre Bruneau
Une autre source de fierté pour le Québec est sans contredit
le journaliste et chef d'antenne de TVA, Pierre Bruneau, qui a pris sa retraite
après 46 années d'une présence jugée par une grande majorité de la
population comme rassurante. Cet homme a accompagné le Québec, dans ses drames,
ses joies, ses victoires et ses défaites. Quand on y pense, il a commencé sa
carrière de lecteur du bulletin de nouvelles lorsque René Lévesque a été élu en
1976 comme premier ministre du Québec, et l'a terminé ces derniers jours avec
le retour de la Formule 1 à Montréal après une longue absence due à la
pandémie. Pierre Bruneau a accompagné le Québec dans ses élections, ses crises
constitutionnelles, ses drames humains comme les événements de la
Polytechnique, la pandémie de la COVID, la crise d'Oka et d'innombrables autres
événements. Avec Bernard Derome, le chef d'antenne de Radio-Canada, il a aidé
la population du Québec à mieux comprendre les événements qu'elle vivait. Il a
fait ce travail en ayant une popularité inégalée comme en témoignent plus de
quarante nominations et 23 trophées ARTIS remportés au cours de sa
carrière. Pierre Bruneau a aussi fait beaucoup pour les enfants malades du
Québec avec la Fondation Charles-Bruneau du nom de son fils décédé de la
leucémie. Il a surtout crédibilisé l'information à Télé-Métropole, ancêtre du
réseau TVA. Il en a fait la principale source d'information des Québécoises et
des Québécois. Ce n'est pas rien si l'on se rappelle l'excellence de
Radio-Canada, son concurrent principal à l'époque. Pierre Bruneau méritait
pleinement l'hommage que lui a rendu le Québec la semaine dernière et c'est à
juste droit que le studio des nouvelles du réseau TVA s'appelle désormais le
studio Pierre-Bruneau. Pierre Bruneau est aussi une raison d'être fier d'être Québécois.
Fêter le Québec
Dans deux jours, ce sera la fête du Québec. Après deux ans
et des poussières de pandémie, une guerre qui amplifie des problèmes
économiques avec une inflation galopante, des élections qui viennent à grands
pas, nous méritons de faire un arrêt et de nous rappeler tous ensemble que le
Québec, louisianisation ou pas, fédéraliste ou souverainiste, nationaliste ou
multiculturaliste, mérite que nous en soyons fiers. Nous devons être fiers de
celles et ceux qui, comme René Lévesque et Pierre Bruneau, par leur engagement
et leur proximité avec le vrai monde, sont une des raisons de célébrer le
Québec d'aujourd'hui...
Bonne fête Québec !