Lorsque que mon ami Samuel et moi sommes arrivés à Cairns par avion en provenance de Darwin (Northern Territory), ce qui nous a d'abord frappés est la densité de la forêt tropicale humide qui l'entoure, la couleur turquoise autour des îles et des récifs à proximité, ainsi que les montagnes abruptes sur lesquelles la ville du Queensland est adossée. Puisque nous étions en mode « petit budget », nous avons dû prendre un lit en dortoir à environ 25$ la nuit, en plein centre de Cairns. Les premières journées, j'ai marché plusieurs kilomètres pour découvrir la petite ville, sa marina, son jardin botanique, son arbre à souliers, les montagnes voisines et ses boutiques de plongée...
Puisqu'il n'y a pas de plage permettant la baignade à Cairns et que tout le monde veut profiter du bord de mer, ils se sont dotés d'une belle grande piscine publique d'allure naturelle : le Lagon de l'Esplanade, juste au bord du Pacifique. Nous sommes allés nous y baigner qu'une seule fois, car l'objectif principal de notre séjour dans le Nord-Est australien était d'aller plonger sur la Grande Barrière de Corail. En attendant de trouver ce qui convenait à chacun de nous en termes de compagnie, de durée et de niveau de difficulté, nous avons eu le temps de profiter des environs.
Samuel, qui voulait aller chercher sa certification de plongeur « open water », s'est inscrit auprès d'une des nombreuses agences offrant le PADI. Nous nous sommes donc séparés pour quelques jours, car j'avais déjà ma certification et je voulais partir pour trois jours et deux nuits sur un « living boat ». C'est dispendieux, mais les forfaits qui incluent tout (nourriture, breuvage, lit à bord, sept plongées) sont tout de même avantageux... De plus, c'était mon anniversaire! Quel plus beau cadeau pour un plongeur que la Grande Barrière de Corail elle-même?
En attendant le matin du départ, je suis allé visiter le Jardin botanique de Cairns : impressionnant! Je ne m'attendais pas à grand-chose, mais j'ai été surpris! On y trouve plusieurs fleurs rares, ainsi que des papillons et des oiseaux de toutes les couleurs! En plus des milliers d'orchidées, j'ai pu admirer la fleur ayant la plus grande taille lors de sa floraison, qui ne dure que quelques jours : l'Arum Titan (Phallus de Titan!). Dans son année de floraison, l'ensemble de pétales peut atteindre jusqu'à trois mètres. Lorsque les pétales s'ouvrent, l'odeur de la multitude d'insectes en décomposition, qui se sont fait prendre au piège, se fait sentir sur plusieurs centaines de mètres! De ce fait, certains la surnomment la « fleur cadavre »... C'est aussi dans les forêts des environs que j'ai appris l'existence d'un oiseau formidable dont je vous parlerai un peu plus dans ma chronique sur la Papouasie : le casoar.
Malgré mon petit budget, j'ai tout de même passé de belles soirées dans deux ou trois de leurs Irish Pubs, mais je rentrais assez tôt afin d'avoir la chance de découvrir le mieux possible cette partie du Queensland. Je le répète, trop de jeunes voyageurs ne font que cuver leur vin au lieu de vraiment profiter du nouvel environnement qui s'offre à eux. Le soleil se couche tôt en août dans cet hémisphère et je souhaitais profiter du plus grand nombre d'heures d'ensoleillement. J'ai quand même pu assister au triste spectacle d'aborigènes, sous influences, criant et insultant les gens dans les bars... Les policiers ont fait leur possible pour rester gentilshommes en leur demandant poliment de quitter les lieux. C'était assez malaisant, car ces hommes remettaient en question la présence des touristes et des Blancs en général sur leur terre australe...
Au petit matin, j'ai pris le bateau avec d'autres plongeurs pour atteindre la Grande Barrière de Corail. Ça a pris environ une heure et demie pour parcourir les 35 kilomètres nous séparant du continent. Arrivés au premier récif, nous avons enfilé notre équipement et sommes partis à la découverte des fonds marins : mais, quelle beauté! Comme j'avais un peu plus d'expériences que les autres, j'ai pu plonger en duo (pas en groupe) durant mes sept plongées. J'ai même plongé de nuit afin de voir les plus grosses espèces en action. J'avoue que sauter en haute-mer en pleine nuit fut assez demandant en terme de confiance, mais ça en a tellement valu la peine. Malgré la houle quasi constante, j'ai pu dormir tellement ces journées de plein-air... ou plein-eau (?), étaient énergivores. Même si j'ai pu admirer une quantité impressionnante de coraux et d'animaux marins, j'ai tout de même remarqué, grâce à notre instructeur qui avait plongé ici plusieurs centaines de fois, que la flore était détruite ou meurtrie à plusieurs endroits... Que ce soit par l'action directe des humains ou par le réchauffement et l'acidification des océans, indirectement imputable à l'Homme. Lorsque vous irez plonger au large de Cairns, prenez soin de choisir une des compagnies locales, qui sont au premier rang dans la lutte pour la conservation de ce fragile écosystème.
À mon retour, Samuel n'avait pas encore terminé sa formation (quel excellent endroit pour apprendre la plongée... tout y est en abondance!), j'ai donc décidé d'aller passer trois jours plus au nord, à Cape Tribulation. C'est un endroit paradisiaque, malgré le fait qu'il y pleuve quasi quotidiennement : ce n'est pas une forêt pluviale tropicale pour rien! Même si la mer et les plages sont à couper le souffle, il n'est pas très recommandé de s'y baigner en raison des crocodiles marins et des méduses-boîtes (Box Jellyfish), qui sont souvent mortelles dû à leur puissant venin. Durant la période où j'y étais, il y avait moins de risques, mais les responsables de notre hébergement en bord de mer nous suggéraient toutefois de ne pas aller dans l'eau. De grosses bouteilles de vinaigre étaient attachées aux arbres le long de la plage, afin de se défaire des méduses trop gourmandes. J'ai cependant pu me saucer dans quelques-unes des sources fraîches et limpides se trouvant plus en amont.
L'attrait principal se situe plutôt vers l'intérieur des terres. Il s'agit de la plus vieille forêt du monde, l'une des seules représentantes des anciennes forêts pluviales et datant de plus de 100 millions d'années! Je suis allé me promener seul dans cet endroit si puissant et ressourçant à la fois. Ici, la nature est en constante compétition pour profiter des infimes rayons de soleil qui percent au travers de la forêt dense et luxuriante. C'est ainsi que les plantes y évoluent rapidement et de façon originale : des figuiers étrangleurs, des plantes parasites, des lianes à crochets, des fleurs carnivores. Juste le fait d'être dans cette forêt nous détrempe au complet tellement le taux d'humidité y est élevé, alors imaginez lorsqu'il faut grimper à travers les racines : l'eau nous ruisselle constamment sur la peau!
Comme l'Australie compte un nombre extrêmement élevé d'animaux et d'insectes venimeux, j'avais toujours un bâton pour marcher et je touchais le moins possible les branches, lianes et troncs qui balisaient l'étroit sentier. Arrivé au sommet du Mont Sorrow, la vue était magnifique! Même si l'humain s'est récemment et subtilement établi dans ce coin du monde, le paysage n'est pas sans rappeler l'authenticité originelle qui primait avant que nous commencions à transformer et à aménager nos territoires.
Je vous invite fortement à visiter le Queensland et l'Australie en général, c'est l'un des plus beaux endroits de notre planète et il est possible de s'y promener sans dépenser une fortune si on se donne un peu de temps pour l'improvisation...
Bon voyage !
David Beaulieu