Votre voisine vient vous raconter les malheurs de son frère Xavier. Il est propriétaire d'une résidence qu'il louait depuis de nombreuses années à une famille. Il y a un mois, la famille a quitté les lieux, la résidence n'était plus occupée.
Xavier avait laissé l'immeuble à l'abandon, de nombreux détritus s'y trouvaient tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. La résidence était devenue insalubre et malpropre. Quelque temps avant que la résidence ne soit abandonnée par les locataires, les pompiers avaient été appelés pour éteindre un début d'incendie dans la hotte du poêle. Cet incendie était une conséquence de l'accumulation de graisse dans ladite hotte. À l'arrivée des pompiers, le feu était éteint.
Donc un mois après que les locataires eurent quitté la résidence de Xavier, un des locataires de l'immeuble voisin se réveille en sursaut. Il « croit » avoir entendu une explosion, il regarde à l'extérieur, il constate que le feu sort de toutes les fenêtres. Il téléphone aux pompiers. Durant son appel, une nouvelle explosion se produit, une porte de l'immeuble est projetée de l'autre côté de la route.
À leur arrivée, les pompiers ne peuvent que constater la perte de l'immeuble de Xavier ainsi que celle des deux immeubles voisins.
Aux yeux des pompiers, l'incendie semble suspect, mais la Sûreté du Québec n'a rien trouvé pouvant expliquer la ou les explosions, ni l'origine des incendies.
Le voisin de Xavier n'étant pas assuré, il le poursuit pour perte de son immeuble en vertu des articles 1457, 1465 et 1467 du Code civil du Québec.
« 1457 Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à ne pas causer préjudice à autrui.
1465 Le gardien d'un lieu est tenu de réparer le préjudice causé par le fait autonome de celui-ci, à moins qu'il prouve n'avoir commis aucune faute.
1467 Le propriétaire, sans préjudice de sa responsabilité à titre de gardien, est tenu de réparer le préjudice causé par la ruine, même partielle, de son immeuble, qu'elle résulte d'un défaut d'entretien ou d'un vice de construction. »
Quand il s'agit d'une réclamation en dommages, il appartient au demandeur de démontrer que le défendeur a commis une faute soit par son fait, son imprudence, sa négligence et que cette faute est à l'origine des dommages réclamés.
Les faits ci-haut relatés ont été examinés dans l'affaire Marquis c. Cool, le 22 mars 2011 dans le dossier 700-17-002049-078. Le juge en est venu à la conclusion que malgré l'état piteux de l'immeuble, le demandeur n'a pas fait la preuve que ce fait était la cause de l'incendie. En conséquence, le recours fondé sur l'article 1457 C.c.Q. ne pouvait réussir.
En examinant l'article 1465 C.c.Q. et en appliquant la jurisprudence à la matière, le juge recherche alors quelle pourrait être la cause de l'incendie et il précise : « ...il incombe à la victime de démontrer non seulement une cause possible, mais plutôt la cause probable. »
Dans le dossier à l'étude, bien qu'il ait eu explosion, les experts n'ont pas été en mesure de déterminer si celle-ci pouvait être considérée comme la seule cause déterminante de l'incendie. En effet, le juge écrira :
« D'ailleurs, il y a eu explosion certes, mais a-t-elle été la cause ou la conséquence de l'incendie? La preuve ne permet pas de le déterminer. »
C'est ainsi que le demandeur ne pouvant pas prouver ni la responsabilité de son voisin ni la cause de l'incendie a vu son recours rejeté avec les dépens.
Dans notre exemple, Xavier n'aurait pas été tenu responsable de l'incendie chez son voisin. Il faut également souligner qu'étant assuré, Xavier a bénéficié des services d'un avocat défrayé par l'assureur, ce qui n'est pas le cas de son voisin puisque n'étant pas assuré, il a non seulement subi la perte de son immeuble et de sa valeur, mais il a dû assumer les frais et honoraires de son avocat.
En conclusion, vaut mieux être assuré.
Au plaisir.