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Assurance et déclaration de l’assuré

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Fontaine Panneton Joncas Bourassa & Associés Par Fontaine Panneton Joncas Bourassa & Associés
Jeudi 14 juillet 2016

En matière d'assurance, il est établi dans le Code civil du Québec que l'assuré doit déclarer à son assureur toutes les circonstances qui sont de nature à influencer l'assureur dans l'établissement du risque, de la prime et de sa décision de l'accepter. C'est ainsi que toute déclaration contraire à la vérité permet à l'assureur de refuser d'indemniser l'assuré. Ce principe est quelque peu mitigé de la façon suivante :

« Toutefois, si la réalisation du risque a entraîné la perte à la fois de biens mobiliers et immobiliers, ou à la fois de biens à usage professionnel et à usage personnel, la déchéance ne vaut qu'à l'égard de la catégorie de biens à laquelle se rattache la déclaration mensongère (art. 2472 C.c.Q in fine)

C'est donc dire qu'un assuré pourrait faire une fausse déclaration relativement à son immeuble et que malgré tout, il pourrait tout de même être indemnisé pour la perte de ses meubles dans le cas d'un incendie par exemple, si sa déclaration faite à l'assureur était exacte concernant ses meubles.

Il existe aussi un autre grand principe en assurance habitation, c'est celui voulant qu'un prêteur hypothécaire ne soit pas affecté par une déclaration mensongère de l'assuré. En effet, en 1990 dans l'affaire Banque Nationale de Grèce c. Katsikonouris, la Cour suprême du Canada a tranché que la clause de garantie hypothécaire que l'on retrouve habituellement dans un contrat de prêt hypothécaire constituait un contrat distinct entre l'assureur et le créancier hypothécaire; en conséquence, les fausses déclarations d'un assuré n'affectent pas le paiement du produit d'une assurance au prêteur hypothécaire.

Récemment, il m'a été donné de prendre connaissance d'une cause qui vient limiter quelque peu ce grand principe et pour cause d'ailleurs.

En effet, le 9 juillet 2015, l'honorable Michel Pinsonnault a rendu une décision dans l'affaire Dubois c. Wawanesa (500-17-074135-123) dans laquelle il a refusé à l'assuré et à son prêteur hypothécaire le bénéfice de la police d'assurance.

Les faits sont assez rocambolesques, mais en voici un résumé.

Un père et son fils habitent une résidence dont le père a la propriété. Ce dernier rencontre des difficultés financières et ne peut plus rembourser le prêt hypothécaire.

Avant de perdre complètement l'immeuble par une prise en paiement du créancier, un ami "shylock" suggère au père un moyen d'éviter d'être mis à la porte; pour ce faire, l'ami signe un bail pour l'occupation de la résidence avec le père.

Plus tard, le créancier hypothécaire tente sans succès de faire annuler ce bail. Placé devant cette situation, le créancier hypothécaire baisse le prix de vente de la résidence. Par l'intermédiaire d'une compagnie dont il a le contrôle, le "shylock" achète ledit immeuble pour la somme de 85 000,00 $, Express Finance avance la somme de 92 00,00 $ pour l'acquisition de l'immeuble; Express Finance connaissait l'immeuble pour l'avoir fait évaluer par un professionnel un peu plus tôt. L'évaluateur accordait alors une somme de 170 000,00 $. La vente de l'immeuble a lieu le 24 février 2011.

La même journée, soit le 24 février 2011, le fils communique avec l'assureur Wawanesa pour faire assurer le même immeuble; il indique qu'il a payé celui-ci 125 000,00 $ et qu'Express Finance est le créancier hypothécaire. Il obtient l'émission de la police d'assurance, alors qu'il n'est pas propriétaire. Le fils deviendra propriétaire le 16 mars 2011 en payant la somme de 92 850,00 $ au vendeur (shylock); la même journée, le fils hypothéquera l'immeuble pour la somme de 125 000,00 $ prétextant entre autres vouloir faire des améliorations. Dans son témoignage, le fils prétendra n'avoir jamais touché d'argent. Le contrat d'hypothèque contient la fameuse clause d'assurance dont il a été fait mention antérieurement.

Sans surprise, le fils n'est plus en mesure de rembourser le prêt hypothécaire. Le « shylock » est mis à contribution et trouve une dame qui, sur la foi des propos de son nouvel ami de cœur (qui comme par hasard est un ami du « shylock »), est prête à signer une offre d'achat au montant de 235 000,00 $. Selon le témoignage de cette dame, son nouvel ami devait tout prendre en charge.

La promesse d'achat est signée entre 22 heures et 23 heures le 12 octobre 2011 alors que l'agent d'immeuble vient à peine de sortir de l'hôpital, suite à un double infarctus.

La suite... à 1 heure 52 dans la nuit du 13 octobre 2011, les pompiers reçoivent un appel les avisant d'un incendie. À leur arrivée à 2 heures 06, la résidence et le garage étaient complètement embrasés et le feu se propageait à la maison voisine comme l'écrira le juge. »

Je vous fais grâce des différentes déclarations du fils qui sont évidemment contradictoires les unes des autres, pour attirer votre attention sur le prêt hypothécaire d'Express Finance.

Wawanesa reprochait entre autres au fils de ne pas l'avoir avisé qu'il faisait affaire avec un « shylock », ce qui l'aurait incité à faire des vérifications concernant Express Finance dont son président a été tué par balle avant le procès. En effet, il appert que le président avait déjà purgé une peine d'emprisonnement et qu'il était un proche du crime organisé.

Après avoir déclaré que les déclarations mensongères du fils, même si elles entrainaient la nullité ab initio de la police d'assurance, ne sont pas opposables au prêteur hypothécaire, le juge considère que la présence de:

« ...circonstances exceptionnelles en l'espèce justifie la déclaration de nullité ab initio de la clause de garantie hypothécaire émise en faveur d'Express Finance (par. 301) »

Plus loin, le juge écrira :

« L'ensemble de la preuve est suffisamment prépondérante pour permettre au tribunal de conclure qu'Express Finance a exercé dans cette affaire un rôle qui n'est pas celui d'un prêteur hypothécaire traditionnel (p. 425). »

Plus loin, le juge affirmera:

« Bref, le tribunal est d'avis que cette affaire est empreinte d'un environnement fétide où des prêteurs dits "alternatifs", de moralité douteuse par surcroît, ont tenté de prendre avantage financement (sic) de façon indue de l'assureur Wawanesa en se servant de Richard (le fils) pour faire office de figurant qui allait permettre l'émission d'une clause de garantie hypothécaire en faveur d'Express Finance (par. 438). »

Comme quoi il arrive que certains principes de droit sont revisités quand il s'agit de cas flagrants d'abus de ces mêmes droits.

Au plaisir.


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