« T'es pas ben... va te faire soigner... » Une phrase banale, lancée sans grande réflexion, va se percuter avec éclat sur le tympan de celui qui souffre en silence. Une phrase qui lui fera ravaler sa salive parce qu'il s'était convaincu de parler cette fois, de laisser sortir sa douleur...
Mais là, comme le fredonne Andréanne A Malette dans les différentes radios du Québec,
tu t'enfonces, à chercher des réponses. Tu fabules, tu délires. Plus rien ne te fait rire...
Soudain, ton corps se fige, comme si ce tout petit grain de sable dans ton engrenage se transformait à chaque souffle en roche, en montagne, en Kilimanjaro... Le surmonter ? Impossible ! Tu ne t'es jamais entraîné pour ça. Entends-tu le tonnerre gronder au loin ? Cours vite, enfuis-toi. Vite, tu pourrais y laisser ta peau. Il n'y a pas que ton rythme cardiaque qui devrait s'affoler ; tes jambes aussi ! Mais, elles sont paralysées. Il ne faudrait surtout pas que tu prennes la mauvaise décision, comme à l'habitude. Tu ne livres jamais ce que les autres s'attendent de toi, à l'école, à la maison, avec tes amis... Allez, arrête de penser...
Prend une décision, gauche ou droite ? La tempête tropicale s'en vient. Ton souffle s'accélère plus vite que la Ferrari du voisin. L'oxygène essaie de se frayer un chemin, mais tes poumons semblent saturés. La communication est complètement obstruée. Tu as l'impression de te noyer dans cette mer invisible qui t'engloutit, qui t'entraîne vers elle. Pourtant, tu ne souhaites pas y laisser ta peau... Tu cherches seulement une raison d'exister. Tu souhaites voir briller cette lueur d'amour et d'admiration dans le regard de l'autre. Tu ne veux pas t'éteindre. Ton désir ardent est de retrouver ta place à travers les rayons du soleil qui semblent t'avoir oublié à travers la grisaille...
Puis, une rafale du sud vient subitement changer la trajectoire de la dépression. L'ouragan semble désormais moins menaçant. Inspirer et expirer s'enregistre de nouveau dans la case des réflexes de ton cerveau. Tes yeux sont gorgés d'eau par l'intensité des émotions que tu viens de vivre, mais tu reprends le contrôle, une larme à la fois...
Certains comprendront ce que tu vis, d'autres non. Notre bagage émotif est unique, c'est tout à fait normal. L'essentiel, c'est de s'éloigner du jugement, même lorsqu'une situation semble farfelue ou à l'opposé de notre réalité. Personne ne choisit d'entendre des voix, de changer de personnalité subitement, de broyer du noir...
Comme personne ne choisit de se fracturer une phalange ou une hanche.
Quoi que ce genre de maux nous semble plus accessibles. On s'intéresse aux circonstances entourant la blessure, on dispense le blessé de certaines tâches, on devient plus indulgent. Le parallèle devrait être le même avec le blessé mental. Même si sa douleur est invisible, il a besoin qu'on s'y attarde. C'est vrai par contre que l'histoire est parfois plus longue à raconter.... et à écouter.
Beaucoup de campagnes sont faites d'ailleurs autour de la prise de parole. Je suis d'accord; parler fait grandir, parler aide à guérir, parler amoindrit le mal... Mais, il est impossible de s'exprimer devant les oreilles absentes.
« Dis-moi ce qui ne va pas... mais pas trop longtemps. Je ne voudrais pas rater le début de District 31 qui débute sous peu et ne diffère pas trop de mes états d'âme... je pourrais te juger. »
Malheureusement, la caricature ne fait pas partie de cet exemple. En terme de santé mentale, nous avons tous un rôle à jouer. Ne serait-ce que d'augmenter notre niveau d'écoute devant l'invisible. De multiples signaux sont envoyés chaque jour et plusieurs sont ignorés. Ce n'est souvent pas de la mauvaise foi, mais plutôt un manque d'ouverture. Certains se soucient de la veille tout en planifiant l'avenir... leur champ de vision du moment présent est complètement obstrué. L'objectif n'est pas de se culpabiliser... seulement d'en prendre conscience et le reste suivra.
Je tiens d'ailleurs à saluer la LHJMQ pour son initiative dans la campagne; la santé mentale parlons-en. Plusieurs joueurs du Phoenix de Sherbrooke se sont confiés en toute humilité sur le sujet. C'est beau de voir ces jeunes athlètes partager ces moments d'intensité avec leur public.
Saurons-nous les écouter ? :)
Les capsules vidéo vous seront présentées lors du match de ce soir (le mercredi 21 février) à 19h au Palais des sports alors que le Phoenix reçoit l'Armada de Blainville-Boisbriand.
Isabelle Perron
Photos: captures d'écran (Phoenix de Sherbrooke. Merci à Tristan Grégoire pour sa photo prise lors de son voyage au Kilimandjaro pour la Maison Aube-Lumière.