« Il retient cela de sa mère... », « tel père, tel fils ... ».
L'enfant est un maître dans l'apprentissage et la reproduction des « mimiques », attitudes et comportements de ses modèles ; majoritairement ses parents. À quel moment, ou plutôt par quel phénomène cet enfant parvient-il cependant à se percevoir comme un être à part entière, un « lui-même » ? Bonne question.
Le développement de l'identité chez l'enfant est incontournable et nécessaire. Cependant, c'est la croissance de son vrai « soi » qui sera associée au sentiment de confiance, à l'affirmation de soi, à l'empathie et aux comportements pro-sociaux chez le futur « full - ado » et l'adulte en devenir. Par un « presque » beau mystère, l'acquisition d'un sentiment cohérent et continue d'être entier, de penser par soi-même et de devenir un « JE SUIS » prend initialement forme à travers les yeux du parent.
« Il semble fâché le bel amour. Il a raison d'être fâché. Maman va t'aider mon cœur, viens. »
Que vient-il de se produire ? Identifier, nommer, valider, tolérer et aider à réguler. Il semblerait que ces étapes, plus faciles à énumérer ici qu'à mettre en pratique, avouons-le, soient les clés de voute pour donner toutes les chances à l'enfant de prendre conscience de son existence et d'ériger une identité qui lui est propre. En jargon psychologique, ce phénomène où le parent reprend en mots (avec assez d'exactitude et une réponse démontrant la capacité de se mettre à la place de l'enfant) ce que celui-ci n'arrive pas à exprimer autrement qu'en criant ou peut-être même en s'isolant, se nomme le miroitement (mirroring).
À travers ce phénomène de reflet des émotions qui s'opère dès les premières interactions entre le parent et l'enfant, celui-ci apprend que certaines émotions émises par son parent sont en fait les siennes, qu'elles sont légitimes et, petit à petit, il intègre ce qui lui est reflété comme faisant partie de sa propre identité. L'enfant devient donc ce qu'il perçoit dans le « miroir ».
Que se passe-t-il cependant lorsque le parent n'arrive pas à interagir avec l'enfant comme un miroir et que le petit est soumis à des réactions impulsives ? Lorsque ce parent n'est pas disponible, négligent ou qu'il est violent face aux demandes de l'enfant ? Malheureusement, le même processus opère et l'enfant en construction identitaire, à la recherche de son vrai « soi », sera susceptible d'intégrer une vision de lui-même qui est fausse, qui appartient à son parent et qui ne pourra être associée aux bienfaits connus à long terme d'un vrai « soi ». Pas dramatique lorsque l'enfant « prend les plis » d'un parent aimant peut-on penser... Mais bien différent lorsqu'il grandit en intégrant la peur, l'agressivité ou l'absence totale d'émotivité qui ne font pas partie de ce qu'il aurait pu être.
Rappelons-nous donc que l'enfant se perçoit et se construit dans les yeux de celui qui le regarde !
Marie-Pier Verner, psychologue