La rigueur.
Concept plein de promesses. Mais concept délavé. Lapidé, en fait, par des promesses non tenues. Toute la crédibilité que contenait le mot a été siphonnée à grands coups de phrases vides.
Pourtant, la rigueur, c'est rassurant, non? Comment ne pas se sentir rassuré quand on entend des phrases comme : « C'est un chercheur rigoureux. » « C'est un entraîneur rigoureux. » « Il suit rigoureusement la loi. » « Il est rigoureusement juste. »
Mais voilà que la rigueur est un concept spolié par les esprits tordus des machines électorales. Coupons plus ou moins aveuglément partout (y compris dans le réseau communautaire), accumulons par le fait même des surplus, et redistribuons des sommes pour être réélus. Mieux encore, faisons-le au nom de la rigueur! Personne ne pourra nous en vouloir!
On le sait, maintenant : la rigueur se déjoue facilement par des phrases bien ficelées. Des firmes se spécialisent dans le message à livrer.
En politique, la rigueur implique des gestes défensifs. « Nous avons dû couper partout, y compris dans les ressources communautaires au nom de la rigueur. Nous n'avions pas le choix. Nous avons agi avec courage! »
Dans le discours politique, exigeons l'utilisation du mot vigueur. Ne serait-ce que parce que ça implique l'action!
Imaginez un gouvernement qui agirait avec vigueur pour maximiser l'utilisation des ressources communes (le produit des impôts et taxes) pour diminuer les inégalités et aplanir les distorsions entre les classes sociales!
Imaginez un gouvernement qui agirait avec vigueur en parlant d'environnement. Une vigueur qui favoriserait un modèle d'affaires circulaire dans lequel le gaspillage n'est pas une partie de l'équation.
Imaginez un gouvernement qui agirait avec vigueur pour récupérer les impôts perdus et évités via les paradis fiscaux.
Imaginez un gouvernement qui agirait avec vigueur au nom d'une collectivité plutôt qu'au nom d'un système économique concentré à accumuler son profit.
Agir avec vigueur pour une collectivité, ce serait, par exemple, tirer une leçon de l'explosion de train à Lac-Mégantic.
Pourtant, à peu près rien n'a été retenu. On a rigoureusement aidé les entreprises en abaissant les critères de sécurité, mais on ne démontre aucune vigueur à réparer les pots cassés. Ah! On a été bons en gestion de crise! L'argent et les ressources publiques sont venus réparer les dommages causés par la volonté des dirigeants d'aider l'entreprise privée en diminuant ses obligations de sécurité. Troublant, quand même!
On ne pourra pas toujours surfer sur le principe d'alléger les responsabilités des entreprises en prétendant que ça briserait l'équilibre de notre système. Et si tel est le cas, qu'on me démontre qu'on est encore en équilibre!
Imaginons de la vigueur...
En lieu et place, on se dirigera vers une autre campagne électorale menée autour de slogans qu'on nous répétera ad nauseam. L'important, c'est être élu. Point. Briser une promesse n'est pas grave. Ça fait partie de la « game ».
Pourtant, à gauche et à droite, il y a plein de politiciens impliqués et engagés auprès de leur communauté. Des politiciens capables de vigueur. Des politiciens qui me semblent souvent meilleurs que leur parti politique. Mais qui semblent aussi captifs de la rigueur d'une ligne de parti.
À quand un mouvement #avecvigueurpourlacollectivité ?
Clin d'œil de la semaine
Bris de promesse : c'est fou comme les politiciens sont toujours surpris de ce qu'ils découvrent une fois élus. Même quand ils étaient au pouvoir avant !