Les travaux d'une équipe de la Faculté de médecine et des
sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke et du Centre de recherche
clinique Étienne-Le Bel du CHUS s'illustrent parmi les dix découvertes de
l'année 2013 publiées dans l'édition de janvier du magazine Québec Science.
La découverte de plus de 80 000 protéines, nommées
les protéines alternatives, bouleverse la médecine et la biologie en remettant
en question plusieurs connaissances sur les protéines.
L'équipe de Xavier Roucou, professeur au Département de
biochimie, a publié, en août 2013 dans la revue PLoS ONE, la découverte de ces
protéines encore inconnues jusqu'à maintenant. Quelques exemples de protéines
alternatives identifiées dans le laboratoire avaient déjà été publiés dans les
revues FASEB Journal et Journal
of Biological Chemistry. L'identification de ces protéines ouvre une
nouvelle voie dans la compréhension de certaines maladies neurodégénératives.
Le dogme d'une protéine par gène est déconstruit
Toute l'information essentielle au bon fonctionnement de
nos cellules est contenue dans l'ADN : le matériel génétique est à l'abri
dans le noyau de nos cellules. Ce matériel est nécessaire à la production des
protéines (molécules) pour accomplir la majorité du fonctionnement cellulaire.
Ainsi, les gènes doivent d'abord être transcrits en ARN messagers (ARNm) qui
sont alors modifiés en ARNm matures. Les ARNm matures sont décodés par de
véritables usines mobiles (les ribosomes). Les ribosomes les traduisent en
protéines. En bref, le ribosome déchiffre l'ARNm mature et fabrique au fur et à
mesure la protéine correspondant au gène de départ.
Un ARNm n'égale plus une
protéine
Les cellules utilisent l'ARNm comme un support
intermédiaire des gènes pour fabriquer les protéines dont elles ont besoin. Un
dogme persiste à ce jour concernant ce mécanisme : les ribosomes
produisent une seule protéine pour chaque ARNm mature, appelée la protéine de
référence, et celle-ci joue un rôle bien précis dans la cellule. L'équipe du Pr
Roucou a découvert qu'il n'y a pas une seule façon de décoder un ARNm mature.
« On peut désormais affirmer que le dogme est
inexact, explique le professeur Roucou. L'information transmise par les ARNm aux
ribosomes peut être décodée de plusieurs manières par ces derniers, menant à la
production de plusieurs protéines alternatives complètement différentes. »
En bref, à partir d'un seul ARNm mature, les cellules produisent non pas une,
mais plusieurs protéines distinctes ce qui entraine forcément plusieurs
fonctions.
Une découverte qui rend la
communauté scientifique perplexe
La communauté est perplexe puisque la découverte remet en
question les connaissances fondamentales acquises depuis longtemps en biologie.
Le constat est tellement dérangeant que l'équipe de Pr Roucou a eu du mal à
faire publier ses travaux dans les revues les plus prestigieuses, comme
Science. « Nos résultats sont provocateurs. Nous l'avons réalisé en
analysant les commentaires des réviseurs et éditeurs. Nous avons dû refaire des
démonstrations pour appuyer nos faits », explique Xavier Roucou.
À propos de l'équipe de recherche
Xavier
Roucou est professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé et
chercheur au Centre de recherche clinique Étienne-Le Bel du Centre
hospitalier universitaire de Sherbrooke. Les membres de son laboratoire ayant
participé aux études sur les protéines alternatives sont les étudiants Benoît
Vanderperre, Danny Bergeron, Cyntia Bissonnette, Catherine Lapointe et Solène
Vanderperre ainsi que les professionnels de recherche Guillaume Tremblay et
Julie Motard.
Crédit photo : Michel Caron, Université de Sherbrooke
Source : Isabelle Huard, conseillère en relations médias du Service des communications de l' Université de
Sherbrooke