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D’où vient le Bye Bye ?

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 30 décembre 2020

Regarderez-vous le Bye Bye demain soir ? Puis, quelques jours plus tard si ce n'est le lendemain les médiasregorgeront de critiques et de commentaires sur ce que l'on aura aimé ou pas du Bye Bye 2020. On s'avisera sûrement de critiquer les comédiens, le choix des sujets, la réussite ou non de certaines imitations. Pas de doute que la pandémie, les covidiots, les discours en solitaire de Trudeau et la messe quotidienne de François Legault ainsi que les références au président Trump y occuperont une place de choix. C'est toujours amusant quand on regarde une émission du Bye Bye de confronter la lecture de l'actualité qui en est faite avec la nôtre. Bien sûr, il y a aussi la façon dont cela sera abordé. Chose certaine, critiquer le Bye Bye, c'est la routine du jour de l'an. Business as usual. Mais si l'on se demandait, plutôt que de jouer au critique spécialisé du Bye Bye de cette année, d'où vient cette tradition de se réunir en famille pour voir les faits marquants de l'année.

Le Bye Bye de Radio-Canada

Certains diraient à juste titre de la revue de fin d'année, le Bye Bye, qu'il est une tradition bien ancrée perpétuée par la Société Radio-Canada depuis 1968.

Voici l'historique que l'on peut retrouver sur Wikipédia :

« L'émission a été présentée toutes les années de 1968 à 1998. Toutefois, en raison de la démission des membres de l'équipe du Bye Bye 1997, le spécial n'a pas été présenté cette année-là. Cependant, une rétrospective des meilleurs Bye Bye avait été diffusée. En 1998, Daniel Lemire prend en charge toute la structure du Bye Bye. Ce fut le dernier spécial jusqu'à ce que Radio-Canada engage Véronique Cloutier pour une nouvelle formule en 2003. L'année 2004 ayant été difficile pour Cloutier, Radio-Canada a décidé de ne pas renouveler l'expérience.

À la demande populaire et constatant qu'il n'y avait plus de domination télévisuelle la veille du Jour de l'an, Radio-Canada engage le groupe Rock et Belles Oreilles (RBO) pour concevoir une nouvelle mouture du Bye Bye, celui de 2006, afin de souligner les 25 années d'existence du groupe. C'est aussi RBO qui a conçu le Bye Bye 2007. Toutefois, en 2008, Radio-Canada s'est tournée à nouveau vers Véronique Cloutier pour animer et produire cette revue télévisée de fin d'année.

Avant de recevoir l'appellation Bye Bye, le concept a été présenté sous un autre nom, soit Salut '57 !, diffusé le 31 décembre 1956, le 31 décembre 1957 et puis pendant trois autres années, de 1959 à 1961 c'est l'émission Au p'tit café qui se charge de la revue de l'année qui se termine. D'autres comme Zéro de conduite, Ça va éclater ! et, Les Couche-tard furent aussi utilisés pour les spéciaux de fin d'année présentés les télédiffuseurs.

La comédienne et humoriste Dominique Michel a participé à pas moins de dix-sept Bye Bye dans toute sa carrière, incluant le spécial de 1997, 30 fois Bye Bye. Ce fut ainsi son dernier Bye Bye. »

Cela conforte sûrement celles et ceux qui ont répondu que le Bye Bye est une tradition purement télévisuelle implantée par la Société Radio-Canada. Mais ce n'est pas toute la vérité. S'il est vrai que la formule des Bye Bye télévisuels est issue de Radio-Canada et de la télévision, la tradition des revues d'actualité est un pur produit du début du théâtre et du début de la scène à Montréal au 19e siècle. Voyons cela de plus près.

Montréal, Québec Canada, 1900

Les premières revues d'actualité occupent une large place sur la scène culturelle montréalaise au début du 20e siècle. La population se prend d'affection pour ces nouveaux produits culturels et on y retrouve autant un public ouvrier qu'un public de classes bourgeoises. C'est d'ailleurs à partir de ces revues d'actualité que se créera au Québec une véritable tradition théâtrale.

Les revues d'actualité sont des spectacles hétéroclites composés de plusieurs sketchs, chansons, saynètes et monologues. De façon générale, ces revues traitent d'événements d'actualité de la vie et sociale de l'époque et elles mettent en vedette des politiciens et des personnalités connues. On y retrouve aussi des personnages insolites inventés de toutes pièces comme le personnage Maison à louer, Scandale de l'électricité. Règle générale, la trame narrative est assurée par une commère ou un compère qui raconte au public présent une histoire en se servant de lieux et de personnages.

La meilleure revue de cette époque selon les auteurs est Le diable en ville d'Alexandre Sylvio. La presse relate ce spectacle de la façon suivante : « Le diable est revenu sur terre pour se rendre compte de ce qui s'y passe, étant donné du grand nombre de mortels qu'il reçoit dans son domaine. Il fait le tour de la ville et avec ses deux personnages qui l'accompagnent, on visite l'Hôtel Mont-Royal, on rencontre l'heure normale, l'amateur de radio, une salle de théâtre, un cinéma. Les situations sont cocasses et l'humour est au rendez-vous.  » On retrouve là l'essence même des Bye Bye d'aujourd'hui même si le produit culturel a beaucoup évolué.

Des racines françaises

« Ces revues d'actualité ont des racines proprement françaises. Elles ont été les principales attractions culturelles à Montréal de 1900 à 1930 et ont accompagné la venue de la modernité au Québec. On doit les premières revues d'actualité locale à des Français établis à Montréal tels les frères Delville, Numa Blès et Lucien Boyer. Par la suite, on retrouve une influence américaine par le biais des spectacles de variétés et du burlesque. Alexandre Sylvio produit Y'en a dedans en 1927. Ce spectacle aligne saynètes, dialogues, sketchs, parodies, chansons en solo ou en duo, en plus d'un burlesque de la vie moderne intitulé le progrès en l'an 50. » (Lacasse et coll., p. 103.)

Les revues d'actualité connaîtront un immense succès et elles seront supplantées à la fin des années 30 par la radio et le théâtre qui commence à prendre de l'importance sur les scènes de Montréal. Ce n'est que vers la fin des années 1950, plus précisément en 1957, que ces revues d'actualité reprendront forme à la télévision avant de devenir la tradition des Bye Bye que nous connaissons si bien aujourd'hui.

Le Bye Bye 2020

Au moment où j'écris cette chronique, je ne sais pas si le Bye Bye 2020 sera une bonne cuvée. Je sais cependant qu'il fera selon toute vraisemblance une large place à la COVID-19, aux covidiots, au bon Dr Arruda, à François Legault et Justin Trudeau. Parlera-t-on des Premières Nations et de leurs barrages alors qu'il y a eu l'affaire Joyce Echaquan ? Simon Jolin-Barette nous parlera-t-il à nouveau de son projet de Loi à venir sur la langue française ? Comment traitera-t-on de l'affaire du professeur Duval et des gourous de la nouvelle censure aux sensibilités élevées à toute injustice réelle ou fantasmée ? De nombreuses options s'offrent aux scripteurs du Bye Bye qui ont l'embarras du choix en ce qui le concerne. Chose certaine, l'édition du Bye Bye 2020 fera l'objet de moult commentaires de la part de tous les observateurs comme le sont toutes les émissions de télévision qui ont encore le privilège d'avoir une cote d'écoute de plus d'un million de téléspectatrices et de téléspectateurs. Ce que je sais cependant c'est que ce Bye Bye 2020 est issu d'une vieille tradition de revue d'actualité qui a dû faire face en leur temps à de nombreuses critiques et même à la censure de l'Église catholique. Une Église qui n'aimait pas beaucoup le théâtre léger et l'humour grinçant de pièces comme Le diable en ville. Autres temps, autres mœurs me direz-vous.

Ce qu'il faut retenir c'est que si la critique est parfois dure envers nos créateurs culturels, nous pouvons au moins nous consoler du fait que nous n'avons plus la censure de l'Église, bien que nous ayons maintenant celle d'une nouvelle gauche irascible. En ce début d'année 2021, rappelons-nous combien la liberté d'expression est une valeur chère pour nous tous...

SANTÉ, Bonheur et Prospérité pour 2021 !

Lectures recommandées : Germain Lacasse, Johanne Massé et Bethsabée Poirier, Le diable en ville, Alexandre Sylvio et L'émergence de la modernité populaire au Québec, Montréal, Presses universitaires de Montréal, 2012, 306 p.

  • Le texte de cette chronique a déjà été publié, mais cette version est remaniée.


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