Vous devez connaître l'histoire du fermier qui un jour, par hasard, au détour d'un sentier, trouva un étrange œuf? L'œuf était un peu plus gros que celui d'une poule. Notre homme l'apporta avec lui et le plaça dans le nid d'une poule de son poulailler. Il croyait avoir découvert un œuf de dindon sauvage.
Tous les jours, l'agriculteur allait voir son œuf. Un bon matin, il aperçut un oiselet maladroit avec à peine quelques plumes. Ce petit poussin était complètement différent des autres poussins du poulailler. Il décida alors de l'engraisser avec les autres poussins la basse-cour jusqu'au jour où il serait comme les autres poulets, assez dodu pour en faire un délicieux repas copieux.
Dès les premiers jours, les autres poussins du poulailler remarquèrent sa différence. Il n'était pas comme les autres. Plutôt que de l'intégrer malgré sa différence, ils l'isolèrent. Notre petit oiseau était devenu le sujet de discussion de toute la basse-cour. Dès le début, certaines poules exprimaient que s'il était différent, il devait être une menace pour l'harmonie du poulailler! (Hélas, depuis la nuit des temps, l'ignorance est un proche parent de l'intolérance!) Encouragée par ces commentaires négatifs, le reste de la basse-cour se mit à dénigrer tout ce qu'il pouvait faire et même ce qu'il ne faisait pas!
Du matin au soir, notre pauvre oiseau devait supporter les sarcasmes. Il ne comprenait pas pourquoi il recevait tant de méchanceté. Il n'avait rien fait pour mériter tout cela. Il est vrai que sa démarche était sautillante et maladroite. Ses ailes étaient disproportionnelles pour le reste de son corps. Chaque semaine, son apparence l'éloignait des standards d'esthétisme des poussins devenus des jeunes poulets.
Le seul réconfort que notre oiseau avait dans toute sa journée, c'était le soir lorsque toutes les poules dormaient, juché au haut du poulailler, il aimait contempler les étoiles. Étrangement, il avait l'impression qu'il n'était pas à sa place dans la basse-cour. Le poids de sa marginalité était lourd à supporter.
Un bon matin, las des l'insultes, il n'avait plus la force de se battre. Notre oiseau décida d'en finir et s'approcha de la plus haute fenêtre et se lança dans le vide. Dans sa descente mortelle, ses grandes ailes se déployèrent et plutôt que de s'écraser au sol, notre oiseau plana à son grand étonnement. Il regarda ses ailes et pour la première fois de sa vie, il fut envahi d'une immense joie. À chaque coup d'aile, il montait dans le ciel et par le fait même, s'éloignait du poulailler.
Notre oiseau n'était nul autre qu'un majestueux aigle!
L'histoire se termine en disant que notre aigle ne retourna jamais plus au poulailler sauf un certain jour d'automne alors qui volait très haut dans les nuages, il fut intrigué par un bruit strident qu'il n'avait jamais attendu aux alentours du poulailler. Il descendit en planant doucement jusqu'au dessus de l'emplacement de la basse-cour et de sa vue perçante, il vit le fermier qui s'affairait à aiguiser sa hache sur la meule afin de percevoir sa récolte annuelle de poulets dodus.
Toute cette histoire tourne autour des préjugés. Nous pourrions voir les poules comme nos comportements inhospitaliers que nous pouvons avoir envers les étrangers et les marginaux. Pensons-y avant d'agir comme les volailles de la basse-cour.