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JEVI : de l’autre côté du téléphone

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Elizabeth Nadeau Par Elizabeth Nadeau
enadeau@estrieplus.com
Lundi le 1 février 2016

La division estrienne de JEVI a reçu 11 691 appels entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015, une augmentation de 203% en cinq ans. En cette semaine nationale de prévention du suicide, Estrieplus.com a voulu rencontrer ces personnes agissant de l'autre côté de l'appel de détresse.

Tania est travailleuse sociale de formation et agit à titre de coordonnatrice clinique, c'est-à-dire qu'elle coordonne l'équipe d'intervention chez JEVI et fait de l'intervention en face à face avec la clientèle depuis cinq ans.

Marie-Ève est formatrice auprès de la population et des professionnels. Comme les autres intervenants, elle œuvre auprès de tous les types de clientèles : les personnes suicidaires, les personnes endeuillées, les professionnels, les proches inquiets.

Sébastien est superviseur clinique, c'est-à-dire qu'il agit comme référence chez JEVI en répondant aux questions des intervenants, un travail qu'il a lui-même accompli pendant quatre ans.

Comme intervenant et comme personne, comment arrive-t-on à gérer un appel?
« On ne peut pas complétement sortir la personne de l'intervenant, affirme Marie-Ève. Nous sommes teintés de nos valeurs, de nos expériences, de nos croyances et de qui on est. On réagit bien aux appels parce qu'on peut compter sur des outils efficaces. Nous sommes une ligne d'intervention et non pas une ligne d'écoute, donc nous sommes outillés pour intervenir auprès de la clientèle. Les outils nous servent entre autres à évaluer le degré de dangerosité, et on se base dessus pour mettre les bonnes actions en place, on ne se fie pas sur notre feeling simplement. »

« Les appels sont tellement différents, on ne sait jamais sur quel type de situation on tombera. Cela peut être un professionnel qui demande une information ou qui a besoin de coaching, comme ça peut être une personne sur le point de se suicider, affirme Tania. Les intervenants sont prêts à ça, la formation dure plusieurs semaines et on a préparé le futur intervenant à tous les types de situation. Il n'est jamais seul non plus, il y a toujours un minimum de personnes présentes pour réagir à ce qui arrive, mais aussi pour soutenir les autres. Les outils, la formation, l'équipe, tout ça aide. »

Des statistiques probantes
Entre le 1er avril 2014 et le 31 mars 2015, JEVI a eu 11 691 contacts téléphoniques, ce qui se traduit en 48 interventions par jour, ou huit à l'heure. Un appel peut gérer dix autres contacts : un proche, un professionnel, un psychiatre, un policier, une relance auprès de la personne.

« Sur cinq ans, nous avons connu une augmentation de 203%, soit de 4000 à 11 500 appels dans l'année. C'est hyper positif! », affirme Tania.

Ah oui? « Avant, on était plus en mode "si la personne veut de l'aide, elle nous contactera", explique Marie-Ève. Maintenant, on n'attend plus. Si une personne de l'entourage nous contacte et nous fait part qu'un de ses proches ne va pas bien, on essaie d'entrer en contact avec cette personne. On agit, on relance des gens qui ne savent pas qu'on va le faire et dans 95 % des cas, les personnes vont accepter l'aide ou du moins nommer le fait qu'ils ne vont pas bien. »

Cette augmentation de 203 % du nombre d'appels ne signifie pas qu'il y a plus de gens en détresse, soutiennent les trois intervenants. Cela signifie que les gens vont plus souvent chercher de l'aide, que le milieu a trouvé des façons efficaces d'aller chercher les gens.

« Plus de proches vont appeler parce qu'ils s'inquiètent. Le pire qui peut arriver, c'est que la personne nous dise qu'elle ne veut pas d'aide, mais c'est rare, souligne Sébastien. Et on poursuit toujours l'intervention jusqu'à ce qu'on sente que la personne soit capable de poursuivre toute seule son chemin. »

« Il faut qu'on continue à prendre cette chance d'essayer d'offrir de l'aide et parfois, les gens sont mêmes soulagés d'être amenés à en parler. Une personne suicidaire n'est pas une personne qui veut mourir, c'est une personne qui veut cesser de souffrir et qui ne sait plus comment s'en sortir. Si on lui offre une nouvelle possibilité, elle la prendra. Nous, on travaille avec la partie de la personne qui veut encore vivre. Parfois, ces gens n'en reviennent tout simplement pas d'avoir un jour pensé au suicide lorsqu'ils regardent en arrière », soutien Marie-Ève.

Agir en partenariat
Si la formation des intervenants est bien meilleure aujourd'hui, selon Sébastien, il y a aussi beaucoup plus de sensibilisation vis-à-vis du suicide qu'à une certaine époque. Aussi, JEVI est devenu un partenaire estimé des autres services.

« Les relations avec les partenaires sont bonnes et ils ne craignent pas de remettre la personne entre nos mains, souligne Tania. On ne couvre pas 100 % des cas, mais nous avons établi une belle collaboration avec les trois corps policiers du territoire et le réseau hospitalier. Dans les suivis étroits, par exemple à la suite d'une hospitalisation après une tentative, l'entente qu'on a avec le milieu suggère qu'on puisse être en contact avec le patient pour établir une offre de services à cette personne avant qu'elle ne retourne chez elle. »

La personne est libre d'accepter ou de refuser l'offre de services de JEVI.

« On ne peut pas forcer quelqu'un à recevoir nos services ou à venir nous rencontrer. C'est plate, c'est difficile, mais on doit respecter son choix si elle refuse, concède l'intervenante. On essaiera de mettre certaines choses en place tout de même. Si on a eu un contact avec des proches, on travaillera avec eux et les professionnels au dossier quand les autorisations nous le permettent. On essaiera de créer un filet de sécurité, une autre façon pour venir en aide à la personne. »

Encore tant de mythes et de défis
Selon Sébastien, il n'y a pas de facteur commun entre les appels de personnes en détresse si ce n'est que le vase qui a finalement débordé.

« Il n'y a pas de cause précise qui déclenche le sentiment de détresse, c'est multifactoriel. Par exemple, ce ne sera pas la rupture, mais celle-ci sera un élément déclencheur dans l'univers de la personne. La seule chose commune à la majorité des personnes suicidaires, c'est le goutte qui a fait déborder le vase et qui devient la raison de l'appel », explique-t-il.

Les acteurs de la prévention du suicide combattent les mythes et les préjugés depuis bien des années.

« Un des grands défis que nous avons à surmonter, c'est le difficile changement de mentalité sur une foule de sujets. Un de ceux-là est l'image véhiculée de l'homme, qu'il est fort, que pour lui, demander de l'aide c'est d'être faible. Malheureusement, cette vision persiste encore aujourd'hui, affirme l'intervenant. La proactivité fonctionne avec cette clientèle, mais les appels seront plus difficile set nécessiteront plus de doigté. Il faudra convaincre l'homme qu'il est courageux de demander de l'aide. »

« Les tabous en lien avec la recherche d'aide et le suicide tendent à changer mais sont toujours présents, tout comme ceux entourant la maladie mentale, renchérit Tania. On entend encore trop souvent que les gens qui se suicident sont lâches parce qu'ils n'ont pas été capables d'affronter leurs problèmes, ou encore qu'ils sont courageux parce qu'ils sont passés à l'acte. »

Et que si la personne parle de se suicider, ce n'est pas si sérieux que ça et qu'il ne passera pas à l'acte.

« Les gens pensent que ceux qui verbalisent ce qui ne va pas, ce sont des gens qui ne se suicideront pas ou qui sont des manipulateurs et qu'ils ne sont pas réellement rendus là, explique Marie-Ève. En fait, les trajectoires de vie des personnes qui sont décédées par suicide démontrent clairement qu'à un moment ou à un autre, elles en ont parlé. Huit personnes sur dix auraient, de façon formelle, énoncées leurs intentions suicidaires. C'est un mythe énorme à combattre. »

« Il n'y a pas de moule d'intervention, on doit toujours adapter nos interventions à la personne : un homme, une femme, une personne âgée, un ado... On s'adapte », conclut Tania.

Besoin d'aide? 1-866-277-3553.


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