Chaque fois c'est pareil, comme si c'était ma toute première course. De plus, je suis la première sur la ligne de départ et il n'est pas question que quelqu'un passe devant moi.
Mon coeur bat à tout rompre quand j'enclenche la première vitesse et m'assure que tout est en ordre pour mon départ. Un pied sur l'embrayage, l'autre sur le frein et très près de l'accélérateur, j'annonce à mon cerveau que la prochaine manoeuvre doit se faire extrêmement rapidement si je ne veux pas caler le moteur et rater mon départ.
Lorsque le drapeau vert s'anime, je serre le volant, lâche le frein, enfonce l'accélérateur et relâche l'embrayage très rapidement. Résultat? Je suis littéralement propulsée au fond de mon siège, tandis que la route défile à toute vitesse devant mes yeux. Une main bien agrippée au volant et l'autre déjà en place sur le bras de vitesse, je jette un oeil au compteur qui monte à une vitesse fulgurante. Le cri aigu du pot d'échappement transperce mes tympans et m'indique que je dois changer de vitesse. D'un rapide jeu de pieds, jumelé à un mouvement de mon bras qui l'est tout autant, je passe en deuxième. Je jette un oeil au compteur et l'aiguille continue de grimper. Je passe en troisième et en quelques secondes seulement, j'ai dépassé les cent milles à l'heure. Il reste encore trois vitesses et je suis persuadée que ce parcours ne me permettra pas de les utiliser. Un virage se dessine déjà vers la gauche. Il est long et me permet de garder une vitesse élevée. La prochaine courbe, située sur la droite, est beaucoup plus prononcée. Je rétrograde et prends à l'extérieur pour couper vers l'intérieur et gagner du temps. La voiture colle sur la route, suivant parfaitement le virage en grondant sourdement, comme si elle ne voulait plus jamais quitter le bitume.
J'appuie sur l'accélérateur en sortant du virage et réenclenche la troisième. Des sueurs froides s'emparent de moi à la vue de la prochaine courbe, qui se révèle être en épingle. Je rétrograde et la prends à haute vitesse. L'inertie m'attire sur le côté de la portière et le bruit strident des pneus, qui dérapent légèrement, me donne une impression de perte de contrôle. Heureusement, la voiture tient parfaitement la route et je poursuis le virage à cent quatre-vingt-dix degrés en jubilant.
Mon corps est tendu et mon cerveau analyse ce qui se dessine devant moi. Je n'ai absolument pas le temps de remarquer le paysage ou de me soucier des autres coureurs. Je garde mon attention sur le parcours.
Le son du moteur, quand je le pousse à haute révolution et quand je rétrograde, est très stimulant. Je ne regarde pas le compteur; je me concentre sur ce qui se passe droit devant. Je me fie à mon instinct et tout va pour le mieux. La piste est parfaite, sans bosse ni crevasse.
Continuant de rouler à la vitesse maximale que me permettent les courbes et les virages en épingle qui se succèdent, je suis calée au fond de mon siège, le casque bien campé contre l'appuie-tête.
Après plusieurs tours, j'entame la dernière courbe à gauche qui me mène à la ligne d'arrivée. Une fois sur la portion droite de la piste, j'appuie l'accélérateur au fond et grade rapidement les vitesses pour atteindre...
Je retiens mon souffle et lorsque je la passe à toute vitesse, je me permets enfin de respirer. Rétrogradant, je ralentis pour atteindre une vitesse plus normale et ça y est, c'est fini.